Crédit : Safran
A l’arrachée ! Safran vient d’inscrire son nom sur les tablettes du record du Tour des Iles Britanniques. Ce samedi matin 18 juin, le grand monocoque emmené par Marc Guillemot, Yann Eliès, Loic Lingois, César Dohy et Didier Le Vourch a franchi la ligne d’arrivée au cap Lizard à 9h 34 minutes et 20 secondes*. Safran signe un temps de parcours de 6 jours, 9 heures, 48 minutes, 50 secondes et améliore ainsi de 1h 42 minutes et 03 secondes le chrono de référence détenu depuis juin 2009 par Dee Caffari et son équipage exclusivement féminin, à bord d’Aviva. Safran a bouclé le parcours à 11,52 nœuds de moyenne sur l’orthodromie (la route théorique) de 1773 milles. Mais en réalité il a parcouru plus de 2000 milles à 13 nœuds de moyenne. Partis voilà un peu moins d’une semaine de ce même cap Lizard, le samedi 11 juin à 23h45 heure française et en duel avec le PRB de Vincent Riou et Hugues Destremau, l’équipage de Marc Guillemot finit donc par s’imposer à l’arrachée, sachant que PRB a dû abandonner hier suite à la rupture d’un étai.
Difficile… donc intéressant !
Particulièrement difficile, avec des vents forts (jusqu’à 48 nœuds) et de la grosse mer mais aussi des systèmes météo différents à gérer, le record n’en a été que plus intéressant pour Marc Guillemot, Yann Eliès et les trois autres marins du bord. Dès la mer du Nord - la tentative étant entamée dans le sens antihoraire d’est en ouest – de gigantesques champs d’éoliennes, non indiqués sur les cartes marines, puis un bateau en remorque obligeaient à des manœuvres d’évitement qui faisaient perdre du temps à Safran et faisaient subir deux avaries : rupture d’un grand spi et de deux lattes de grand-voile. La stratégie qui consistait à rester à l’avant d’un front chaud devenait alors obsolète et il a fallu s’adapter, en relation avec Sylvain Mondon, de Météo France. « Aux Shetland, nous n’avions plus de marge et ne pouvions plus espérer battre le record que de trois petites heures », explique Sylvain. Les conditions rencontrées sont exigeantes : 35 nœuds moyens au près, rafales à 45, et une mer grosse avec des creux de 4 à 5 mètres. Soit « un peu comme pendant la Transat Jacques Vabre 2009 », quand Safran avait hérité du surnom « machine de guerre », en plus de « l’avion de chasse » connu jusqu’ici, c’est dire… PRB, moins lourd avec trois hommes en moins est alors en tête. L’équipage de Safran aura le mérite de ne rien lâcher et de mener une stratégie parfaite dans toute la deuxième moitié du parcours. Notamment à l’ouest de l’Irlande, où trois virements de bord sont enchaînés dans une mer démontée pour aller chercher une rotation au vent enfin portant. Après avoir eu plus que sa ration de près dans une mer mauvaise – au point qu’il fallait ralentir le bateau pour le préserver de la violence des chocs - Safran peut enfin ouvrir les voiles et débouler à grande vitesse depuis le sud-ouest de l’Irlande quand on apprend que PRB est victime d’une avarie : rupture d’étai qui contraint finalement à l’abandon Vincent Riou et Hugues Destremau. Safran, lui, accélère tribord amûres et ne fera plus qu’un seul empannage, juste avant le dernier bord victorieux vers la ligne d’arrivée. Près, reaching, portant, mer grosse… toutes les conditions auront été rencontrées par le bateau sur ce très difficile tour des Iles Britanniques ! Un excellent entraînement pour la Transat Jacques Vabre donc et une prise en mains idéale pour Yann Eliès, qui sera le coéquipier de Marc Guillemot sur la grande course de l’année.
Deux questions à Marc Guillemot
Marc, ce record a été difficile à battre…
« On n’a pas beaucoup de marge ! Un bon bateau qui partirait maintenant et aurait de bonnes conditions pourrait améliorer notre chrono d’une trentaine d’heures, je pense. Peut-être qu’on essaiera de nouveau un jour nous–mêmes, d’ailleurs. Ceci dit nous sommes tous très satisfaits car il a fallu aller le chercher ! Le vent et surtout la mer étaient si durs que, par moments, nous avons volontairement ralenti le bateau : parfois nous n’étions plus en mode record, juste dans la préservation du matériel ! Il y avait des chocs énormes. Les conditions étaient parfois plus dures que pendant la Transat Jacques Vabre 2009 où nous avions pourtant eu droit aussi à du très gros temps. »
Le bilan ?
« Très, très positif à plusieurs titres. Nous avons pu valider dans des conditions très exigeantes les modifications du chantier d’hiver et le bateau a tenu à part deux avaries mineures en mer du nord (spi et lattes de GV, ndr). L’idée du duel avec Vincent était bonne et nous sommes sincèrement déçus pour eux. Nous aurions préféré terminer à deux bateaux. Ils ont très bien navigué jusqu’à leur avarie. Enfin, la navigation en équipage permet toujours d’avancer sur des détails et Yann (Eliès) s’est parfaitement adapté au bateau, cela a été une excellente prise en mains pour lui. Et puis, comme après chaque aventure, nous sommes simplement ravis de l’avoir menée à son terme et de rentrer à l’écurie. Nous devrions arriver ce soir ou dans la nuit à La Trinité-sur-Mer et pouvoir nous reposer. »
* - Tous ces chiffres sont en attente de validation par le WSSRC.
Source : Mille et une vagues / Safran