La Solitaire du Figaro / A fond la caisse dans le Golfe

Conduite, maîtrise, trajectoire… et vitesse, parfois sous spi au largue serré : dans 20 à 25 nœuds de vent, la bagarre fait rage au beau milieu du golfe de Gascogne, avec des positionnements marqués d’Est en Ouest. Au pointage de 16h, Jérémie Beyou (BPI) mène la danse sur la route directe.

Crédit : Courcoux Marmara / Le Figaro

Les affres du franchissement de dorsale sont déjà un souvenir pour les 45 Figaristes engagés dans cette deuxième étape de La Solitaire du Figaro, entre Gijón et Brest (385 milles). « Franchir la dorsale a donné lieu à des positionnements à différentes latitudes », explique le directeur de course Jacques Caraës. Et de fait, au moins 4 grandes idées différentes se dessinent, de la route directe au grand large, sur un delta latéral qui atteint les 17 milles entre les plus orientaux et les plus occidentaux.

Qui aura raison ce soir, probablement en début de nuit, quand il faudra virer la bouée SN1 au large de Saint-Nazaire ? Ceux qui jouent la carte du minimum de chemin à parcourir comme Jérémie Beyou (BPI), lequel a creusé un bel écart en tête (3,2 milles)… ou bien au contraire ceux qui ont montés dans l’Ouest et pourront « écraser » quand ils le jugeront opportun, en ouvrant leurs voiles et en accélérant ainsi vers SN1 ? « Il faut voir si mon avance par rapport en distance au but est suffisante ou s’ils arrivent, malgré leur retard, à écraser » témoigne Jérémie. « Moi je suis sous spi à fond la caisse et mon objectif est de faire le moins de route possible.» L’an dernier, Jérémie Beyou avait gagné à Saint-Gilles-Croix-de-Vie une étape assez similaire. Et déjà, comme hier, il avait volé le départ en Espagne avant de passer en tête à SN1 puis de conclure en Vendée. Un signe ?

Bouée SN1 vers 22h ?
Ce n’est pas fait, quarante-quatre autre bateaux et non des moindres ne l’entendant évidemment pas de cette oreille. François Gabart par exemple (Skipper Macif 2010) est deuxième mais surtout positionné au vent du leader – c’est le cas de la majorité des bateaux de tête en dehors de BPI – et il assure que « ça commence à sacrément bien glisser, dans 23 nœuds de vent ». Le leader du classement général Armel Le Cléac'h (Brit Air) est à l’affût lui-aussi : 4e à 3,9 milles. Kito de Pavant (Groupe Bel) est également à la lutte à l’avant : 3e à 3,7 milles. Et même si les écarts au leader paraissent conséquents sur le papier, quand ceux de l’ouest ouvriront leurs voiles, ils pourraient bien fondre comme neige au soleil. Qui aura raison à SN1, alors ? « Pour l’instant, impossible à dire » prévient Jacques Caraës, qui voit le premier bateau passer la bouée vers 22h ce soir. « Jérémie Beyou ne fait pas d’écart de route et il va vite, est-ce que les autres pourront compenser avec un meilleur angle vers la bouée, c’est toute la question. »

Reste que la bagarre est splendide dans le golfe de Gascogne. Finesse des réglages, choix des voiles, des trajectoires et maîtrise de la conduite du bateau dans le vent soutenu (mais instable) sont au programme. Chez les bizuths par exemple, on se rend coup pour coup entre, Anthony Marchand (Espoir Région Bretagne, 7e), Francisco Lobato (ROFF/Tempo Team, 9e) et Damien Guillou (La Solidarité Mutualiste, 13e). Alors que la tête de course évolue cet après-midi à 200 milles de l’arrivée, les places aux avant-postes dans l’estuaire de la Loire vont être chères… et n’oublions pas que cette deuxième étape sera loin d’être finie à la bouée SN1. Car ensuite, c’est très probablement en louvoyant qu’il faudra s’attaquer à la remontée des côtes de Bretagne Sud. La nuit sera chaude, donc. Sportivement parlant, s’entend. Brassières capelées, balises en poche, tous se préparent au forcissement attendu du vent. A une bagarre encore plus furieuse donc… avant une nouvelle faiblesse du vent qui devrait retomber aux environs de 15 nœuds demain.

Ils racontent :
Jérémie Beyou (BPI) : « Ça devient physique, il y a de grosses différences de trajectoire, on ne voit plus personne. Il faut gérer les grains, il y a un peu de boulot. J’ai décidé de glisser dessous. Au-dessus, ils ont une dizaine de milles de latéral. Il faut voir si mon avance par rapport distance au but est suffisante ou s’ils arrivent, malgré leur retard, à écraser. (…) Il ne fait pas beau, gris, la mer est encore correcte, le vent est monté d’un cran, cela commence à être humide. Là je suis sous spi, à fond la caisse ! »

François Gabart (Skipper Macif 2010) : « Ça commence à sacrément bien glisser, je suis sous petit spi il y a 23 nœuds de vent, j’ai eu jusqu’à 27 nœuds… On a toujours de la houle qui vient de gauche et rend la conduite un peu difficile, il faut se concentrer à la barre pour essayer d’avancer le plus vite possible. J’ai fait le choix hier soir d‘être centré par rapport à la flotte, je ne voulais pas prendre le risque d’être complètement à l’Est ou l’Ouest et je suis content de la façon dont ça s’est passé. En fin de nuit, j’ai pas mal dormi sous génois, le bateau allait bien sous pilote. Je suis à 95 milles de SN1 et j’avance à environ 10 nœuds. »

Classement du jour à 19h :
1  BEYOU Jérémie BPI
2 GABART François SKIPPER MACIF 2010
3 LE CLEAC'H Armel BRIT AIR
4 de PAVANT Kito GROUPE BEL
5 *  LOBATO Francisco ROFF/Tempo-Team
6 *  MARCHAND Anthony ESPOIR REGION BRETAGNE
7  DELAHAYE Fabien PORT DE CAEN OUISTREHAM
8  D'ALI Pietro I.NOVA
9  DROUGLAZET Eric LUISINA
10  DUTHIL Frederic BBOX BOUYGUES TELECOM
*catégorie bizuth

Source : La Solitaire du Figaro