Thomas Ruyant se dévoile avant de s'élancer sur le Vendée Globe : "Evidemment j’ai envie de jouer avec la tête de flotte"

 

De ces premiers bords en solitaire au large de Dunkerque à la fierté d’avoir mené son projet LinkedOut avec toute son équipe jusqu’au départ du Vendée Globe, Thomas Ruyant se livre sur sa vie et ses envies à quelques jours du grand départ. Rencontre.


Credit : P.Bouras/TR Racing
 


Vos premiers bords : où, quand, dans quelles circonstances ?

 "J’ai des photos de moi sur un bateau de croisière, celui de mon parrain, au large de Dunkerque, je devais avoir 4 ou 5 ans. Et après j’ai fait des stages d’Optimist."

 

Comment est né votre désir de faire de la course au large ?

 "Au fil de l’eau. Ce n’est pas une envie qui est venue d’un coup. Ça a commencé au lycée, je faisais du First Class 8 en équipage, j’adorais ça. Après mes études, j’ai eu envie de participer à la Mini Transat, c’est la course qui me faisait un peu rêver mais sans aucune ambition, c’était un truc que je voulais faire avant de rentrer dans une vie active classique si je puis dire.

 Au moment où je faisais du Class 8, mon père avait acheté un bateau de croisière, un Flush Poker. Il l’a revendu ensuite pour un Sprint 98. Je lui prenais son bateau, seul, ce sont mes premiers souvenirs de voile en solitaire. Je faisais des ronds dans l’eau devant Malo-Les-Bains et je trouvais ça grisant de lui piquer son bateau et de manœuvrer tout seul."

 

A partir de quand et pourquoi est-ce devenu un projet de vie ?

 "Après la Mini Transat 2007, le directeur de Faber France, qui avait adoré suivre la course, m’a proposé de continuer sur l'édition suivante. En 2009, je remporte la victoire et ce même patron me dit « On fait quoi maintenant ? ». Nous sommes donc partis sur la Route du Rhum en Class 40 en 2010 ! C’est à ce moment-là que je n'ai plus eu envie d’arrêter et que j'ai même commencé à avoir des idées de Vendée Globe."

 

Un résultat ou une expérience dont vous êtes le plus fier ?

"Il y en a plein mais ce que je vis en ce moment est assez dingue. Je ne suis pas encore parti sur le Vendée Globe mais pouvoir être au départ avec cette équipe-là, d’avoir monté tout ce projet avec la construction d’un bateau, car c’est mon premier bateau à mon image, c’est une grande fierté. 

Je ne fais pas tout ce que je fais là seulement pour le plaisir que j’ai sur mon bateau seul. Je prends aussi beaucoup de plaisir à monter des projets, à construire un bateau avec toute une équipe et à partager tout cela. C’est aussi quelque chose qui m’anime, autant que la navigation."

 Et évidemment en grand souvenir, il y a l’arrivée de la Mini Transat, ma victoire dans la baie de Tous les Saints à Bahia. C’était ma première victoire, c’était fabuleux.

 

Votre qualité principale dans la vie ? 

"La Générosité" 

 Votre principal défaut dans la vie ? 

"J’ai beaucoup d’égo. J’ai envie d’être fier de ce que je fais, un peu trop parfois peut-être."

 Si vous étiez une musique : 

"J’aime de plus en plus l’électro mais je suis très éclectique, j’écoute de tout."

 Votre rêve de bonheur : 

"C’est ce que je vis en ce moment, je suis bien dans mes bottes."

 Si vous n’étiez pas coureur au large, vous seriez ? "

Un aventurier ou un surfeur."

 Quelles sont vos ambitions sur le VG 2020 ?

 "C’est de ne pas avoir de regret. Il y a 4 ans, je n’ai pas terminé et pourtant j’étais super fier de toute la course et de mon parcours. Il peut y avoir des déceptions car on sait qu’un Vendée Globe ça peut vite se terminer. 

Mon ambition était déjà d’arriver aux Sables d’Olonne avec toutes les cartes en main et on y est. J’ai beaucoup de belles cartes, après évidemment j’ai envie de jouer avec la tête de flotte et j’en ai les moyens. Après, il peut se passer tellement de choses qu’il faut profiter de toutes les instants. Je ne veux pas me griser avec des objectifs ou ambitions de classement."

 

Qu’est-ce qui vous empêcherait d’atteindre votre objectif, en dehors de la casse ?

 "L’excès de confiance. Ça peut arriver sur des longues courses comme cela car on n’a pas forcément de rappel à l’ordre. Il y a des phases comme cela où on a l’impression que rien ne peut nous arriver et c’est génial d’avoir cette sensation là, mais il faut bien garder en tête, et c’est peut-être une des leçons que je retire de mon dernier Vendée Globe, que tout peut s’arrêter donc il faut bien profiter de chaque moment, sans avoir trop d’égo.

 Le danger peut être de tomber dans des travers émotionnels extrêmes, que ça soit vers le haut ou vers le bas. Il faut réussir à canaliser tout ça."

 

Quelle est votre arme fatale ?

 "Mon envie".

 

Trois images que vous avez du VG :

 "L’engouement du public. Ça représente plein de choses, c’est tout l’historique de la course et ça résume, en termes d’émotions, toute la course. Je suis hyper triste de prendre le départ comme ça cette année. Et puis, il y a aussi la houle du Sud avec une période très longue. Quand tu sors la tête de ton cockpit, que tu montes sur ton roof, tu te rends compte de la puissance de l’élément. Ça fait presque peur."

 

Quel skipper vous inspire ?

 "Adrien Hardy. J’aime sa philosophie de vie, sa façon de faire et de naviguer. Et Antoine Koch aussi. Ce sont des marins d’exception."

 

Vous ne partiriez pas autour du monde sans :

 "Sans les photos de mes enfants."

 

Source : VG