La Solitaire / Mich' Desj' : « Tu ne peux pas te mentir »

A moins de deux semaines du prologue de la 40ème Solitaire du Figaro, le double vainqueur du Vendée Globe, Michel Desjoyeaux, revient à ses premiers amours à bord du monotype roi : le Figaro Bénéteau 2. Découvrez son interview


Crédit : E Allaire 2007

Déjà 10 participations et 3 victoires… Pourquoi revenir sur la Solitaire ?
« Aujourd’hui, ce que je vais chercher, ce n’est pas un quatrième titre. J’y vais pour voir si je suis toujours dans le coup. Pour voir si je sais toujours faire. C’est davantage le tableau de marche qui m’intéresse. Je n’y vais pas pour me prouver quelque chose mais le sourire haut, pour le jeu, pour m’amuser… Cela dit, je ne suis pas encore blasé par la victoire. »

Ton plus beau souvenir de Solitaire…
« En 1998, quand j’ai gagné à Howth (Dublin) en Irlande après une étape qui a duré 100 heures, la plus longue de l’histoire ! Je suis arrivé avec la fin du thermique, la nuit commençait à tomber. J’ai passé la ligne, je suis allé me coucher. Le lendemain matin sur les pontons, j’ai regardé les autres arriver. J’avais une nuit d’avance… »

Une hallucination…
« Sur cette même étape, Cherbourg-Howth, une des seules fois où j’ai sorti le mouillage d’ailleurs. Je suis allé me coucher en disant à Vincent Riou : « réveille-moi quand le vent sera rentré ». J’ai émergé au bout de 3 heures et constaté définitivement que Vincent n’était pas à bord… depuis, j’ai arrêté de boire du Coca. Il faut savoir écouter son corps… »

Ce qu'il te reste de tes trois victoires…
« En 1992, j’avais 27 ans. J’avais fait 4e et 2e les années précédentes, c’était une progression logique. En même temps, à 15 jours du départ, je n’avais toujours pas de bateau. J’avais faim et c’est typiquement la course où quand tu as faim, tu es capable d’aller très loin. C’est une certaine forme de leçon : trop de sérénité, parfois, ça endort. En 1998, ça coïncide avec l’enterrement définitif pour moi de la préparation mentale. J’ai arrêté de réfléchir à la manière dont je faisais les choses… En 2007, on m’attendait un peu au tournant, mais personne ne savait que je m’étais aussi bien entraîné, notamment dans la brise. »

Que t’inspire ce 40ème anniversaire de la Solitaire?
« C’est bien de voir que certaines choses perdurent. C’est une course relativement accessible mais qui t’oblige à aller au bout de toi même, tu ne peux pas te mentir. Et dans un monde qui est de plus en plus assisté, où les gens cherchent en permanence des responsabilités chez les autres, là, tu es face à toi-même, à fortiori en monotype. Et puis 53 concurrents… cela prouve que la voile reste un excellent support de communication, même en temps de crise. »

Source : Team Foncia