Barcelona World Race / Avec 700 milles d'avance, Virbac Paprec 3 "garde le rythme"

Fortunes diverses pour les différents protagonistes de la Barcelona World Race. Sans avoir l’air d’y toucher, Virbac-Paprec 3 a encore accentué son avance, mais devrait perdre du terrain dans les heures à venir. Dans son sillage, on goûte du plaisir des vitesses retrouvées même si la queue de flotte devrait encore payer sa dîme à l’anticyclone qui se reconstitue à la pointe sud de l’Afrique.

Crédit : Virbac Paprec 3

Depuis le temps qu’ils se languissaient ! Mais cette fois-ci, ils sont dans le vif du sujet : les mers du sud ont retrouvé leur caractère habituel. Temps gris, mers formée, vents d’ouest puissants. Et les IMOCA, tels des chevaux de course restés trop longtemps au paddock, s’ébrouent enfin retrouvant des vitesses dignes de leur programme. De MAPFRE à Neutrogena, tous sont partis en chasse du leader qui reste néanmoins largement hors de portée de fusil. Car si Virbac-Paprec 3 risque d’abandonner une part de son avance dans les deux jours à venir, il dispose d’un portefeuille suffisamment garni pour se permettre de lâcher quelques milles dans l’escarcelle de ses poursuivants. Pour Jean-Pierre Dick et Loïck Peyron, l’essentiel est ailleurs : il s’agit avant tout de gérer au mieux la zone de transition qu’ils se doivent de traverser, mais surtout de veiller à l’évolution de la petite dépression qui menace de creuser dans le talweg au sud de Madagascar. Les modèles envisageaient encore hier la menace d’un très fort coup de vent à l’heure où le leader allait aborder la prochaine porte des glaces. Même si cette éventualité semble s’éloigner, Loïck et Jean-Pierre savent trop bien à quelle vitesse évoluent les situations dans le grand sud pour ne pas baisser de vigilance.

Un jeu subtil
Paradoxalement, la meilleure connaissance des phénomènes climatiques et notamment la détection de présence des icebergs a changé fondamentalement la donne. Difficile, pour ne pas dire impossible pour l’organisateur, de ne pas mettre en place un dispositif efficace pour éloigner les concurrents des concentrations d’icebergs et des growler associés. La multiplication des portes, si elle ôte en apparence un certain espace de liberté, ouvre le jeu de manière différente. Auparavant, il s’agissait avant tout de venir flirter au mieux avec les centres dépressionnaires, de rester sur la bordure nord des grands systèmes perturbés pour bénéficier de la route la plus courte et la plus rapide. Aujourd’hui, les sections de parcours obligées amènent les navigateurs à négocier des coups stratégiques moins visibles mais autrement plus complexes. La course a peut-être perdu une part de son parfum d’aventure mais a peut-être gagné en subtilité tactique. C’est d’ailleurs, le dilemme auquel sont confrontés les deux leaders : faut-il se préoccuper de la marche des poursuivants décalés d’un système météo ou bien veiller à l’optimisation de sa propre trajectoire. Pour les deux leaders, le choix est clair : quand on possède 700 milles d’avance, il serait mal venu de faire des comptes d’apothicaire. Virbac Paprec 3 tracera son propre chemin sans se soucier des autres.

Fin de partie
Pour la queue de flotte, la punition risque d’être sévère. Faute de pouvoir rester suffisamment longtemps dans le flux général d’ouest qui emmène le gros du peloton à vive allure, Forum Maritim Catala, We Are Water et dans une moindre mesure, Hugo Boss, Central Lechera Asturiana et GAES Centros Auditivos, risquent de voir l’écart se creuser encore avec la tête du peloton. De 1200 milles celui-ci pourrait aller jusqu’à 1500 milles, soit l’équivalent de cinq jours de course. Jusqu’ici les effets d’accordéon ont joué avant tout en faveur des leaders. Certains doivent commencer à désespérer d’inverser la tendance.

Ils ont dit :
Loïck Peyron, Virbac-Paprec 3 : « On ne se lasse jamais de mettre un peu de distance entre nous et nos poursuivants ; fort heureusement les conditions météos sont encore propices à ça, même si ce sera un peu moins le cas dans les jours qui viennent. Aujourd’hui déjà, on n’a pas beaucoup de vent et donc nous n’allons pas être rapide dans les jours qui arrivent. Mais nous y travaillons et ça avance bien pour l’instant. Avec 700 milles d’écart sur Estrella Damm, on ne parle pas de « contrôle » mais plutôt de « rythme à garder » car de toute façon nous ne sommes pas dans le même système météo. Clairement on va se retrouver dans des situations météos radicalement différentes : on va avoir pas mal de vent très contraire dans les jours qui viennent avec une dépression un peu compliquée à gérer qui semblait très méchante il y a encore 24h. Mais on espère que ça sera moins casse gueule que prévu. Ensuite il faudra continuer à faire attention, à prendre soin de notre beau navire… et ça glisse, ça glisse, car nous sommes des aventuriers rapides ! »

Gerard Marin, Forum Maritim Catala : « Nous naviguons de nouveau avec un ris dans la grand-voile ! Nous surfons de nouveau, comme au Cap Vert, je commençais à croire que ce moment ne reviendrait jamais. Le ciel est couvert et le crachin continu, une poussière d’eau très légère mais qui te trempe complètement. Dès qu’il fera jour nous allons démonter l’aérogénérateur, les conditions changent très vite ici et pas question que nous le perdions quand elles changeront. Ces derniers jours j’étais intrigué, je ne voyais pas de dauphins mais ils sont apparus tout à coup hier après midi. Ils sont très grands, avec la peau sombre et ils ont l’air plus timides que ceux que nous voyons chez nous… ils ne montrent pas autant d’intêret. Qui sait, peut-être ils ne sont pas habitués au trafic maritime. Parce qu’ici, il n’y a personne. »

Michèle Paret, Mirabaud : « On a environ 30 nœuds de vent et ça brasse à l'intérieur ! La nourriture a changé car on a besoin de beaucoup plus de calories face au froid. On mange uniquement du chaud pour résister mieux aux conditions qui sont difficiles et qui sollicitent davantage le bonhomme. Pour l'instant on ne pense pas au stock, s'il y a restriction, on l'envisagera après le Cap Horn. Ce n'est pas dans le Grand Sud qu'il faut restreindre la nourriture car c'est là où nous avons le plus besoin de carburant. S'il faut, nous ferons comme Yves Parlier et nous mangerons des algues dans l'Atlantique Sud ! Pour l'instant, c'est le pilote qui fait marcher le bateau et il s'en sort très bien. On assure bien les manœuvres qui sont délicates dans beaucoup de mer et de vent. »

Classement du 27 janvier à 15 heures (TU+1) :
1 VIRBAC-PAPREC 3 à 17 507 milles de l’arrivée
2 MAPFRE à 707,7 milles du leader
3 ESTRELLA DAMM Sailing Team à 753 milles
4 GROUPE BEL à 801,6 milles
5 RENAULT Z.E à 858,6 milles
6 MIRABAUD à 1128,7 milles
7 NEUTROGENA à 1188,6 milles
8 GAES CENTROS AUDITIVOS à 1412,8 milles
9 CENTRAL LECHERA ASTURIANA à 1718,7 milles
10 HUGO BOSS à 1744,8 milles
11 WE ARE WATER à 1816,6 milles
12 FORUM MARITIM CATALA à 1922,5 milles
ABN FONCIA
ABN PRESIDENT

Source : barcelona World Race