Barcelona World Race / Moulins à vents

Il y a un petit côté Don Quichotte dans l’obstination dont font preuve les tandems de la Barcelona World Race pour s’extirper des griffes des hautes pressions qui règnent sur l’ouest de l’océan Indien. Les navigateurs doivent composer entre une navigation au près éprouvante pour les organismes et une veille attentive des petits centres dépressionnaires qui peuvent générer des vents violents. Sans oublier la nécessaire gestion du quotidien.

 © GAES Centros Auditivos

Décidément, rien n’est épargné aux duos de la Barcelona World Race. Pour le peloton, l’anticyclone situé au sud de l’Afrique se décale vers l’est au fur et à mesure de la progression de la flotte. Pour les hommes de tête, il faut composer avec le passage de petites dépressions issues des latitudes subtropicales qui viennent mettre le bazar dans le bel ordonnancement anticyclonique. La principale raison de cette situation qui perdure tient à la présence de deux cellules anticycloniques, la première au sud de l’Afrique, la deuxième au nord de l’archipel des Kerguelen. Autour de chaque cellule, hémisphère sud oblige, l’air circule dans le sens inverse des aiguilles d’une montre. Sur la face est du premier anticyclone remonte de l’air froid venu du sud. Sur la face ouest du deuxième, descend de l’air chaud et humide. La rencontre de ces deux masses d’air provoque la création de tourbillons qui se transforment en centres dépressionnaires actifs. Tant que les pales des deux moulins continuent de tourner à vitesse suffisante, le phénomène risque de se reproduire. Aujourd’hui, c’est Virbac-Paprec 3 qui est confronté au phénomène, mais le peloton n’est pas à l’abri, d’ici quelques jours, d’une répétition du scénario.

Bato dodo, poulopo
Déjà un mois de mer : à l’heure d’entrer dans les mers du sud, les tandems ont leurs scénarios bien en place. Une partie de la place occupée par les vivres a pu être récupérée et l’on trouve un peu plus ses aises à bord. Ainsi Dominique Wavre et Michèle Paret à bord de Mirabaud, bénéficient-ils d’une vraie couchette libérée par la consommation d’un mois de nourriture ? En revanche, les vivres frais ne sont plus d’actualité depuis longtemps : pour la plupart, les duos alternent entre lyophilisée et conserves roboratives. Retrouver le goût de la nourriture comme chez soi est un excellent antidote contre les pertes de moral. Il suffisait de voir Pepe Ribes, à bord d’Estrella Damm, déguster un riz au curry fait maison pour comprendre les effets psychologiques bénéfiques des recettes locales dans un environnement hostile.

Adieu monde civilisé
Pour autant, la situation qui affecte la flotte n’a pas que des inconvénients. Ainsi les filles de GAES Centros Auditivos, contraintes de remonter vers le nord compte tenu des vents contraires, ont profité des températures clémentes pour faire une dernière toilette. Douche à l’eau de mer et rinçage à l’eau douce, la recette a fait ses preuves depuis les premières éditions des tours du monde sans escale. Le dessalinisateur a permis en outre de ne plus avoir besoin de compter ses réserves, l’eau de mer étant a priori inépuisable. Bientôt, quand les températures auront chuté de quelques degrés, ce sera l’heure des toilettes de chat, des lingettes pour maintenir un minimum d’hygiène corporelle, des vêtements qui font comme une deuxième peau et que l’on n’ose plus enlever avant d’être certain de pouvoir procéder à un récurage complet de la bête. La vie dans les mers du sud présente aussi un caractère végétatif, dont il n’est pas sûr qu’il déplaise fondamentalement à tous ceux qui viennent tenter l’aventure du tour du monde. Retrouver une part de son animalité est une manière de goûter les plaisirs enfantins.

Ils ont dit :
Pepe Ribes, Estrella Damm : « On s’est mis un peu sous pression, ces six dernières heures. On avait choisi de remonter au près pour passer la porte au plus vite et pouvoir piquer vers le sud pour espérer récupérer des vents portants. Pendant ce temps, Groupe Bel continuait en route directe et nous a repris un bon nombre de milles. On est maintenant à quelques milles l’un de l’autre (en distance au but). On les cherche, mais ils ne sont pas beaux joueurs et ne veulent pas se montrer. D’avoir un bateau juste à côté n’implique pas plus de contraintes. Sauf que quand tu perds dix milles sur un bateau situé à plusieurs centaines de milles, tu ne réagis pas de la même manière que si il est juste à proximité. En ce moment tout va bien, on est en forme. On mange sainement, on dort bien et on prend du plaisir à naviguer. »

Dee Caffari, GAES Centros Auditivos : «Ce sont vraiment des conditions bizarres. On est obligé de remonter vers le nord. On a une eau à 20°C, On a doublé la longitude du cap de Bonne Espérance. Le bateau souffre un peu, on ne s’attendait pas à être au près aussi longtemps. Mais du coup, on a pu se laver les cheveux, on en profite. »

Fran Palacio, Central Lechera Asturiana :« Tout va bien. On devrait être à Cape Town dans la journée de demain. On aura quelques heures de réparations et compte tenu des conditions météorologiques sur la zone, on ne va peut-être pas perdre autant que ça. Une chose est sûre : depuis qu’on a changé le mât du bateau (NDLR : Central Lechera Asturiana avait démâté avant le départ de la BWR), il est beaucoup plus facile à mener aux allures de près

Classement du 1er février à 15 heures (TU+1) :
1 VIRBAC-PAPREC 3 à 16 657 milles de l’arrivée
2 MAPFRE à 543,2 milles du leader
3 ESTRELLA DAMM Sailing Team à 680,6 milles
4 GROUPE BEL à 685,1 milles
5 RENAULT Z.E à 843,9 milles
6 MIRABAUD à 1252,2 milles
7 NEUTROGENA à 1310 milles
8 GAES CENTROS AUDITIVOS à 1626,4 milles
9 HUGO BOSS à 1832,7 milles
10 CENTRAL LECHERA ASTURIANA à 2076,6 milles
11 WE ARE WATER à 2099 milles
12 FORUM MARITIM CATALA à 2145,6 milles
ABN FONCIA
ABN PRESIDENT

Source : Barcelona World Race