Barcelona World Race / (In)fortunes de mer

Un Pot au Noir plus conséquent que prévu, une intervention express de la Marine argentine auprès de Mirabaud, une escale forcée à Port Stanley dans l’archipel des Malouines, un cap Horn qui se profile à l’horizon et quelques bateaux qui profitent pleinement de belles conditions retrouvées, tel pourrait être l’inventaire de la flotte de la Barcelona World Race à l’heure où le leader s’apprête à franchir l’équateur.

© Mirabaud

Les photos par satellite ont du bon. A l’heure de franchir le Pot au Noir, Jean-Pierre Dick et Loïck Peyron passent une grande part de leur temps devant l’ordinateur du bord sur lequel ils récupèrent les images des masses nuageuses du Pot au Noir. Et ainsi d’anticiper leur route pour naviguer entre les cumulo-nimbus massifs qui jalonnent la route et espérer garder un vent à peu près stable. Pour l’heure, la méthode semble payer puisque Virbac-Paprec 3 avance à près de neuf nœuds. Heureusement pour les deux leaders, c’est à l’heure où leur voilier était fortement ralenti dans un calme, qu’ils ont croisé à moins de deux cents mètres une baleine bleue en train de reposer à la surface de l’eau. Derrière lui, Iker Martinez et Xabi Fernandez, à bord de MAPFRE, profitent des derniers milles d’alizés avant d’aborder la zone critique qui semble fuir devant leur étrave. Le Pot au Noir semble vouloir remonter vers le nord et c’est autant de chances supplémentaires pour les deux navigateurs basques de recoller.

Hugo Boss jusqu’au bout du possible
Renault ZEquant à lui n’en finit plus de faire de la résistance. Chaque jour annonce un prochain coup de frein de Pachi Rivero et Tonio Piris et pourtant, jusque là, ils n’ont encore cédé aucun mille à leurs adversaires, Neutrogena et Estrella Damm. La situation est plus compliquée pour les dames de GAES Centros Auditivos qui, rattrapées par l’anticyclone n’avancent plus qu’à six nœuds au dernier classement. Nul doute que Dee et Anna en auront profité pour mettre en application leurs dernières résolutions, à savoir un nettoyage de fond en comble du bateau et de son équipage.
Dans leur infortune, elles peuvent se dire que d’autres ont moins de chance. Hugo Boss a dû finalement se résoudre à faire escale à Port Stanley. La presque totalité de leurs voiles s’étant délaminées fortement, les deux navigateurs ont finalement décidé d’un arrêt technique, après avoir essayé vainement de réparer par leurs propres moyens. Mais les dégâts étaient trop lourds pour le matériel dont ils disposaient à bord. Plus à l’arrière Forum Maritim Catala va peut-être récupérer un adversaire avec qui lutter bord à bord. Mais pour l’heure, c’est bien le cap Horn qui occupe les esprits. Gerard Marin, dont c’est le grand baptême des mers du sud, n’espère, quant à lui, qu’une chose c’est qu’ils franchiront la frontière entre Pacifique et Atlantique de jour, de manière à pouvoir faire une photo. On a beau être compétiteur, on peut garder un petit côté fleur bleue.

Ravitaillement en mer pour Mirabaud
Mirabaud a donc signifié officiellement son abandon dans la Barcelona World Race. Dominique Wavre et Michèle Paret avaient en effet reçu ce matin une aide de la Marine argentine sous la forme de 150 litres de gazole permettant à l’équipage de rejoindre au plus vite Mar del Plata. Alertée du démâtage de Mirabaud, le MRCC argentin, en étroite liaison avec la direction de course depuis l’incident, suivait la progression de l’équipage. Informé des risques pour Dominique et Michèle de manquer de gazole pour rejoindre un port de la côte, les hommes du MRCC de Punta del Este ont proposé de dérouter la corvette Granville qui était en opération sur zone à une quinzaine de milles. Un avion de surveillance de la Marine argentine a proposé de larguer quelques fumigènes autour du bateau pour faciliter le positionnement à vue de la corvette. Au bout du compte, un service efficace et rapide, rendu par des marins argentins, trop heureux de mettre en application en réel quelques uns des exercices de simulation qu’ils répètent à longueur d’année. Efficacité de la coordination entre direction de course et MRCC, rappel des principes d’assistance en mer, affirmation de la complète solidarité des gens de mer. Dans sa simplicité et sa fluidité, l’opération a le mérite d’une certaine pédagogie.

Ils ont dit :
Wouter Verbraak, Hugo Boss : « Quand on a commencé nos réparations, au mouillage dans le sound Adventure, on s’est dit qu’il était juste impossible qu’on n’y arrive pas que ça allait prendre du temps, que ça allait juste être très long. On a commencé faire des coutures à la main mais on est vite arrivé au constat que l’on n’aurait pas assez de matériel pour faire une réparation propre. A chaque inspection de voile, on découvrait des dégâts encore plus importants. On était défaits parce que notre premier objectif, c’était vraiment de faire le tour du monde sans escale et c’est pourquoi nous avons essayé de réparer dans un premier temps par nous-mêmes. Ici, l’accueil est extraordinaire : on a transformé l’église en plancher de voilerie, il faudra juste qu’on débarrasse dimanche pour la messe. Il reste encore beaucoup de traces de la guerre de 1980 ; la communauté locale est très soudée et tout le monde se mobilise pour nous. On était parti pour réparer uniquement les voiles, mais Ross, notre manager technique arrive avec de quoi remplacer le rail de têtière de grand-voile… »

Jean-Pierre Dick, Virbac-Paprec 3 : « Hier j’étais de quart et je vois au loin un jet d’eau de cétacé. C’était assez impressionnant, l’animal n’a pas beaucoup bougé et nous nous sommes beaucoup rapprochés. Il était à un nœud et nous à trois nœuds, il était visiblement dans sa sieste. Nous sommes passés à 150 m. C’est énorme. La baleine faisait bien dix mètres de long. C’est imposant. Quand elle commence à se réveiller et à s’agiter, nous savons que c’est elle qui est la plus forte. Il y a toujours un risque de choc, mais quand nous la voyons comme ça, très calme, il n’y a pas de danger. Quand les deux protagonistes, baleine et bateau vont vite, il y a plus de risques évidemment. Les baleines ne sont pas nocives pour nous. Les orques, eux, peuvent attaquer les bateaux, ils sont nettement plus agressifs alors que les baleines ne le sont pas. Elles mangent des petites crevettes. Là, heureusement nous étions parallèles à elle, donc il y avait peu de risques de collision. »

Gerard Marin, Forum Maritim Catala : « Tout va bien. Ludo est en train de dormir et nous avançons à bonne vitesse vers le cap Horn. Ludovic fait très attention à nos trajectoires, pour éviter qu’on ne se retrouve dans des vents trop forts. Le cap Horn devrait être franchi dans la nuit de samedi à dimanche ou peut-être dimanche. J’espère que ce sera de jour, j’aimerais vraiment pouvoir faire une photo du cap. Sinon, on est motivés comme jamais.»

Classement du 17 mars à 15 heures (TU+1) :
1 VIRBAC-PAPREC 3 à 3203,3 milles de l’arrivée
2 MAPFRE à 253,3 milles du leader
3 RENAULT Z.E à 1051,7 milles
4 NEUTROGENA à 1278,8 milles
5 ESTRELLA DAMM Sailing Team à 1341,1 milles
6 GAES CENTROS AUDITIVOS à 2209,9 milles
7 HUGO BOSS à 3264,2 milles
8 FORUM MARITIM CATALA à 4422 milles
9 WE ARE WATER à 6293,1 milles
10 CENTRAL LECHERA ASTURIANA à 8347 milles
ABN FONCIA
ABN PRESIDENT
ABN GROUPE BEL
ABN MIRABAUD

Source : barcelona World race