Transat Bénodet Martinique / "Restons groupés"!

Une semaine de mer déjà dans cette Transat Bénodet- Martinique et des fortunes diverses au sein de la flotte des dix-sept marins. Ainsi, si pour une majorité de solitaires, ce dimanche est dominé par la satisfaction d'une navigation rapide au portant et l'appréciation du caractère définitivement indécis de l'issue de la partie, pour d'autres, l'heure est à la gestion de l'urgence matérielle. C'est notamment le cas pour Frédéric Rivet (Vendée 1) dont l'étai s'est rompu la nuit dernière mais qui reste en jeu. En tête et alors que le gros temps est annoncé, Eric Péron (Macif 2009) devance Fabien Delahaye (Port de Caen Ouistreham) et Erwan Tabarly (Nacarat).

Crédit : A Courcoux

Il y a sept jours, au large de Bénodet, les dix-sept solitaires de la Transat Bénodet - Martinique s'élançaient pour 3 474 milles d'un parcours dont ils ne présumaient alors certainement pas qu'il serait aussi disputé. Une semaine après le coup de canon, les leaders se sont succédés en tête de la course, les conditions météo ont joué sur tous les registres en insistant sur les couleurs les plus foncées et les cartes n'ont cessé d'être redistribuées. A 2000 milles de l'arrivée à Fort-de-France, le trafic se densifie en Atlantique et les solitaires semblent tous se rallier à la politique du "restons groupés"! En effet, malgré quelques petits décalages marqués au gré des opportunités sur ce premier tiers de la route antillaise, nul n'a pris l'ascendant de manière significative... loin de là. Preuve en est le mouchoir de poche dans lequel tous se tiennent. Depuis 16 heures, Eric Péron joue les premiers rôles après avoir littéralement traversé le terrain de jeu du Sud au Nord. Dans son sillage, le jeune Fabien Delahaye, en lice pour sa première course transatlantique en solitaire et déjà couronné en double sur la Transat AG2R LA MONDIALE 2010 avec Armel Le Cléac'h, affiche un moral au beau fixe et s'affirme en chef de file de cette nouvelle génération de figaristes ; talentueuse, méthodique et décomplexée. Derrière, Erwan Tabarly, Thomas Rouxel (Bretagne - Crédit Mutuel Performance), Nicolas Lunven (Generali) ou encore Jeanne Grégoire (Banque Populaire) sont à la lutte. Mais avec des compteurs remis à zéro aux Açores et une suite propice à entretenir tous les scénarios, il est aujourd'hui plus que jamais question d'une large ouverture offerte aux amateurs de petits coups tactiques.

Anticipation à tous les niveaux
Actuellement soumis à un régime de Nord Nord Est force 4 qui va progressivement passer Nord, les solitaires connaissent des conditions très changeantes du fait des premiers effets de cette deuxième dépression qui occupe les esprits depuis plusieurs jours. Ainsi, le front froid attendu ce soir va-t-il générer des vent de force 5 rafales à 6, tournant au Nord Nord Ouest. Moins soutenu que prévu, le phénomène sera plus facile à négocier dans l'ensemble. Mais attention toutefois à bien observer sa trajectoire, l'incertitude entretenue par cette dernière laissant encore à penser qu'elle pourrait ne pas traiter tous les marins sur un pied d'égalité. A l'Ouest, il faut en effet s'attendre à des vents de force 6 rafales à 7, avec la menace de virer au grand frais. A l'Est, le flux de force 4 sera quant à lui irrégulier. Autant dire que les prochaines 24 heures s'annoncent délicates et que l'obsession pour les marins sera alors de soigner l'anticipation afin de se concentrer sur leur sortie de dépression. A l'occasion de la vacation de la mi-journée, la préparation à cette phase sensible - autrement dit le sommeil et la récupération - était dans toutes les bouches, bien conscients du fait que le dernier joueur à lâcher l'emportera dans la baie de Fort-de-France. Pour Frédéric Rivet aussi l'heure était au repos, mais pour d'autres raisons, moins réjouissantes celles-là. Victime de la casse de son étai, le skipper Vendéen a en effet connu la même mésaventure que Gildas Morvan (Cercle Vert) il y a quelques jours. Sur le pont toute la nuit, l'ancien leader de la flotte a mis en place une réparation de fortune, assurant ainsi sa sécurité et celle de son monotype, et espère bien passer le coup de vent annoncé sans dommage. Forcément déçu, celui qui effectue sur cette Transat Bénodet - Martinique sa toute première traversée de l'Atlantique reste bien évidemment dans la course et entend achever son aventure dans les meilleures conditions.

Fabien Delahaye (Port de Caen Ouistreham)
"Le moral ne va pas trop mal. On s’apprête à aborder de grosses conditions. La flotte est pas mal compacte, il n'y a pas beaucoup d’écart. Le classement ne veut pas dire grand chose. Je suis bien placé. Content d’être là où je suis. 
Les dernières 36h, c’était du portant très très fort jusqu’en milieu de nuit et après le vent a molli autour d’une vingtaine de nœuds cette nuit, ce qui a permis de se reposer, car les dernières 24h, je n’avais pas pu dormir, j’étais bloqué à la barre. Du coup, la deuxième partie de nuit et ce matin, j'ai pris beaucoup de repos, de sommeil au vent arrière dans 15-20 nœuds. Et là, le vent a commencé a refuser. On devrait avoir un vent qui devrait forcir et refuser. 
Ca s’annonce compliqué en terme de vent, ça s’annonce très humide. On a va passer sous solent pour affronter le plus gros des conditions. On est sous pilote automatique, à l'intérieur du bateau dans ces conditions là, même si ce n’est pas agréable. Après on aura du spi avec du vent fort. 
 
On a deux modèles (météo) à disposition à bord de nos bateaux, GFS et CEP, qu’on peut récupérer sur des serveurs. Moi, je n’utilise qu’un fichier qui colle vraiment avec la situation météo. Je vais chercher le faisceau de 0h et de 12h. Ce sont donc des fichiers que je vais chercher vers 8h et le soir vers 19h. Après, si j’ai besoin de plus d'éléments, je vais aussi chercher des images satellites, des cartes d’analyse générales. Ce qui permet de se faire une idée précise de la situation météo et du coup, de faire tourner nos logiciels et d’essayer d’adapter sa stratégie en fonction de la réalité"

Frédéric Rivet (Vendée 1) :
"Hier soir, on contournait la dépression, dans des conditions normales, 22 nœuds de vent. On allait passer à l’étape suivante et d’un coup patatras c’est tombé. C’est la partie supérieure de l’étai qui a cassée, au niveau de l’ogive. Ca a cassé net.
J’avais mis un tendeur en bas, mais malgré cela, ça a cassé. C’est un peu le problème sur ces bateau, j’avais mis un étais neuf avant la transat, mais je crois que c’est le destin. Je l’avais installé au mois de février, je m’étais dit que s’il y avait un souci avec toutes les sorties qu’on a faites, il aurait cassé.
J’ai remonté l’étai que j’ai tordu pour sécuriser le tout. J’ai pu ralinguer mes voiles, mais j’ai sûrement des points d’usure sur des drisses, cela m’inquiète un peu. Il y a un peu de mer, j’ai fait une nuit blanche, donc je ne suis pas super motivé pour faire le mariole en tête de mât, d’autant qu’on va avoir du vent jusqu'à demain soir, quitte à faire une route plus Sud dans le fort. Apres ce petit système météo, il y aura peut être moyen de revenir dans la situation
".

Classement au 17/04/2011 à 19:00
1 Fabien Delahaye PORT DE CAEN OUISTREHAM à 2099.6 milles du but
2 Thomas Rouxel BRETAGNE - CREDIT MUTUEL PERFORMANCE à 3.2 milles du leader
3 Eric Peron MACIF 2009 à 4.1 milles du leader
4 Erwan Tabarly NACARAT à 8.2 milles du leader
5 Nicolas Lunven GENERALI à 9.9 milles du leader
6 Jeanne Grégoire BANQUE POPULAIRE à 11.3 milles du leader
7 Eric Drouglazet LUISINA à 13.6 milles du leader
8 Romain Attanasio SAVEOL à 17.1 milles du leader
9 Francisco Lobato ROFF à 20.4 milles du leader
10 Frederic Rivet VENDEE 1 à 24.5 milles du leader

Source : Rivacom