VOR / Franck Cammas :"Ca se passe de mieux en mieux" (vidéo)

Si Ian Walker a incontestablement dominé la régate « in-port » devant Abu Dhabi, Franck Cammas et ses hommes ont démontré un potentiel remarquable dans les petits airs qui ont balayé un plan d'eau couvert de bateaux spectateurs. En prenant la place de dauphin, Groupama 4 confirme que son léger déficit en dessous de huit noeuds est déjà du passé...


Peu de vent et grand soleil pour ce retour à la course après quelques jours de repos à Abu Dhabi : entre cinq et sept noeuds de vent de secteur Sud-Est, pour un parcours côtier privilégiant les manoeuvres et le choix du côté d'un plan d'eau encerclé par les bateaux spectateurs. Car s'il n'y avait que huit milles à parcourir (en moins d'une heure pour le vainqueur émirati), il y avait pas moins de sept marques à contourner avec un départ sous spinnaker, quelques petits bords de vent de travers, deux louvoyages et un autre bord sous spinnaker dans un vent relativement stable en direction.

Avec Laurent Pagès à la tactique, Franck Cammas était mis en difficulté juste avant le coup de canon du départ par Chris Nicholson, Camper voulant préserver sa pole position au bateau Comité, en laissant Groupama 4 dans son tableau arrière... En milieu de ligne, Puma était aussi mis en ballottage quand Telefonica réussissait à le bloquer et un léger contact obligeait Ken Read à effectuer après le départ une pénalité d'un tour sur lui-même, une sanction qui lui coûtait le contact avec la tête de la flotte car il était déjà sous spinnaker avant de faire un 360° !

Bonne vitesse dans les petits airs
Franck Cammas avait laissé entendre que les performances de Groupama 4 devaient être améliorées dans les brises de moins de huit noeuds : cette régate « in-port » était donc l'occasion de confirmer que les nouveaux réglages du gréement et l'arrivée d'un nouveau Code 0 (grand génois pour le débridé) portaient leurs fruits. Dès le premier bord de spinnaker, l'équipage français mettait la pression sur les néo-Zélandais : en empannant juste avant Camper, Groupama 4 se recalait au vent et à la faveur d'une petite risée, couvrait son concurrent et le dépassait avant la première marque du parcours. Sur le côté opposé, Ian Walker « local » de la manche sur Azzam, enroulait le premier la bouée 1, avec trois longueurs d'avance sur le voilier français, lui-même juste devant Camper. Telefonica et Puma étaient déjà nettement décrochés. Ce premier louvoyage voyait Franck Cammas parti le plus à droite du plan d'eau, croiser devant le bateau émirati qui était contraint d'abattre pour l'éviter. Azzam reprenait la main sur la fin de ce bord mais n'avait que 43 secondes d'avance à la bouée 2 alors que les néo-Zélandais semblaient moins à l'aise dans ces petits airs et que les Espagnols de Telefonica multipliaient les fautes de manoeuvres.

Après deux petits bords de vent de travers, Ian Walker contrôlait la flotte suivi comme son ombre par Franck Cammas, tandis que le reste du peloton perdait de plus en plus de terrain : Camper concédait ainsi une minute de plus à Groupama 4 après un nouveau bord de spinnaker toujours dans une brise faible de moins de huit noeuds. Et côté espagnol, un affalage catastrophique du spinnaker lui enlevait toute chance de revenir et il n'avait plus que Puma pour continuer en duel... Le match ne se jouait donc plus qu'entre Abu Dhabi, incontestablement le plus à l'aise dans ces conditions, et Groupama 4 qui lui tenait la dragée haute ! Le deuxième louvoyage permettait d'ailleurs à Ian Walker de creuser un peu l'écart avec le voilier français. Les deux derniers bords de débridé où Franck Cammas et son équipage envoyaient leur nouveau Code 0, leur permettaient de reprendre plus de quinze secondes sur les six dernières minutes de la course...

De bon augure !
De fait, après la victoire de Groupama 4 lors de la course côtière entre Sharjah et Abu Dhabi et suite à cette place de dauphin sur la régate « in-port », le voilier français peut espérer encore scorer dès demain samedi pour le nouveau parcours côtier entre Abu Dhabi et Sharjah, première partie de la troisième étape de la Volvo Ocean Race. En effet, la brise de secteur Nord-Ouest devrait souffler à près de vingt noeuds pour un long bord vent de travers, après un tour de chauffe devant le port émirati. Ces conditions devraient sourire à Groupama 4 et l'aisance manoeuvrière de l'équipage de Franck Cammas ce jour confirme que les navigants ont bien progressé sur ces formats courts. Côté classement général, les écarts se resserrent entre les trois premiers suite à la contre-performance des Espagnols tandis que les Américains sont désormais à seize points du voilier français.

Mais, à la veille du départ de l'Etape 3 - Acte 1 demain à 11h00 (heure française), c'est la revanche d'Azzam et la progression française que l'on retient de cette épreuve côtière.

Ils ont dit
Franck Cammas, skipper-barreur de Groupama 4 :
« C'était une belle bagarre et une très belle place. Nous avons notamment eu une confrontation fructueuse face à Camper qui est un vrai spécialiste de ce type de parcours court. Nous sommes arrivés à les passer à la régulière. Et c'est super pour Ian Walker et son équipage d'Abu Dhabi ! Ce n'étaient pas les meilleures conditions pour nous mais nous avons trouvé la vitesse et c'est une bonne nouvelle pour la suite... Il faut croire à ce qu'on fait, prendre des initiatives et être agressif : il faut que nous continuions dans ce sens. Nous avons adapté le bateau pour la troisième étape où il y aura pas mal de près et de petit temps et le résultat d'aujourd'hui confirme nos options : ça se passe de mieux en mieux à bord en termes de communication et d'affinage des réglages. Même les meilleurs équipages comme celui de Telefonica peuvent perdre des régates mais on sait que le niveau est très serré et la Volvo Ocean Race très longue ! Nous sommes dans une bonne dynamique en ce moment, il est très difficile de dire qui va perdre ou gagner des places sur les prochaines étapes... »

Laurent Pagès, tacticien sur Groupama 4 :
« Nous sommes très contents du résultat : un très bon travail de tout l'équipage et une tactique pas évidente, même si les conditions ont été relativement stables. Personnellement, j'ai une affection particulière pour les parcours où il est possible de jouer avec le vent, au près comme au portant. Un départ sous spinnaker est toujours très intéressant. Nous avons eu l'occasion de mettre plus de pression sur Abu Dhabi lorsqu'il a croisé juste derrière nous sur le premier louvoyage : nous avons préféré contrôler Camper (plus dangereux actuellement au classement général) qui restait encore une menace à ce stade de la course. Je ne regrette pas notre choix et c'est une très bonne chose que Azzam ait gagné aujourd'hui... Je ne serai pas au départ de la prochaine étape, mais je vais vivre la même tension que les navigants ! J'ai une confiance totale dans le groupe qui est homogène et qui prend la mesure de Groupama 4, un excellent bateau, même dans les conditions légères comme aujourd'hui. Nous n'avons aucun complexe à avoir... »

Ian Walker, skipper d’Abu Dhabi Ocean Racing : « On voulait vraiment gagner la course et pour ça, on était prêts à prendre des risques. On savait que, si on gagnait, ce serait vraiment spécial pour tout le monde. Nous sommes impliqués dans une odyssée de neuf mois autour du monde - mais aujourd’hui, c’était la journée la plus importante pour Abu Dhabi. On n’avait jamais vu autant de bateaux sur l’eau, et beaucoup de gens qui ne connaissaient rien à la voile sont venus. Ce qu’ils voient en ce moment, c’est leur drapeau qui est agité en l’air. C’est un vrai frisson quand ça arrive. On nous demande si cette victoire nous redonne confiance, mais nous n’avions jamais perdu confiance. On a le sentiment de seulement commencer cette course. Il y a des jours avec et des jours sans. Le plus important, c’est de profiter du moment. C’est ça, le sport. Un jour, vous êtes en petite forme et vous ne vous en sortez pas. Le jour suivant, vous rentrez en vainqueur. »

Chris Nicholson, skipper de CAMPER with Emirates Team New Zealand : « Dans cette course, les choses peuvent changer rapidement. C’est toujours sur le fil. Il suffit d’un seul mauvais résultat pour tout changer. On a le sentiment d’être au milieu, d’être sur le point de réussir. J’ai très hâte d’enfin arriver à ce moment. Bravo aux deux premiers bateaux aujourd’hui. Ils ont gardé la tête froide dans des conditions très compliquées. Tout particulièrement à Abu Dhabi pour une victoire à la maison – c’est beaucoup de pression. »

Classement de la régate « in-port » à Abu Dhabi :
1-Abu Dhabi (Ian Walker) 6 points
2-Groupama 4 (Franck Cammas) 5 points
3-Camper (Chris Nicholson) 4 points
4-Puma (Ken Read) 3 points
5-Telefonica (Iker Martinez) 2 points
6. Team Sanya 4*
* S'ils rejoignent bien le port secret de l'océan Indien en conditions de course, Team Sanya obtiendra les quatre points de sa sixième place pour la première partie de l'étape ; et récupérera automatiquement un point pour la seconde partie et deux points pour la course In-Port Etihad Airways d'Abu Dhabi.

Classement général provisoire à l'issue de cinq manches
(in-port Alicante, Alicante-Cape Town, in-port Cape Town, Cape Town-Abu Dhabi, in-port Abu Dhabi)
1-Telefonica (Iker Martinez) 1+30+6+29+2 = 68 points
2-Camper (Chris Nicholson) 4+25+5+24+4 = 62 points
3-Groupama 4 (Franck Cammas) 2+20+2+18+5 = 47 points
4-Puma (Ken Read) 5+0+4+19+3 = 31 points
5-Abu Dhabi (Ian Walker) 6+0+3+10+6 = 25 points
6-Sanya (Mike Sanderson) 3+0+1+en course... = 4 points