Thomas Ruyant : « je pense que l’homme a une grande capacité à s’adapter »

"Ne jamais céder à la paniqueSe faire confiance à soi et à son instinct de survie !" Les navigateurs solitaires sur leurs machines de l’extrême sont souvent amenés à devoir affronter l’avarie inattendue et l’accumulation d’avatars synonymes de catastrophes plus ou moins irrémédiables. Comment s’y préparent-ils? Disposent-ils d’une recette, d’un modus operandi en situation de péril majeur. Les réponses de Thomas Ruyant, skipper de l'IMOCA Advens….


Crédit : P Bouras

Quels types de crises es-tu amené à rencontrer dans tes projets ?

Ils sont extrêmement variés ! Je suis un marin mais aussi un entrepreneur à la tête de TR Racing, la structure technique et sportive qui gère les projets de course au large, de la conception du bateau jusqu’à la participation aux courses. 

En mer, je peux faire face à des problèmes médicaux, techniques (ndlr : en 2016 sur le dernier Vendée Globe l’IMOCA sur lequel Thomas naviguait a percuté un OFNI et s’est cassé au large de la Nouvelle Zélande), … 

A terre, ils sont liés aux financements de ces gros projets, aux ressources humaines, …

Bénéficies-tu d’une préparation mentale spécifique pour y faire face (coaching, sophrologie...) ?

Alors non, je n’ai pas de préparation spécifique. J’ai quelques techniques personnelles que j’utilise naturellement pour réussir par exemple à me recentrer, m’endormir en me déconnectant du bateau, … Et qui me servent bien. Je suis assez convaincu que cela est finalement propre à chacun : selon le tempérament, sa capacité à recevoir et accueillir une difficulté, ou encore la manière de gérer ses émotions.

Et cela vient en plus s’enrichir avec l’expérience, car je n’avais bien sûr pas la même aisance à mes débuts sur l’eau ! C’est aussi notre métier qui nous permet de développer cela. A force d’être soumis à des problèmes, des situations de stress, seul sur un bateau dans un environnement hostile… Cela nous pousse à faire évoluer nos comportements et à nous adapter aux situations, quelles qu’elles soient.

Et je pense que l’Homme a justement une grande capacité à s’adapter.

Comment trouves-tu la sérénité ?

Je dirai que cela se joue beaucoup avant la crise et la confiance est pour moi un point essentiel : confiance en moi, mais aussi confiance en mon équipe et au bateau sur lequel je navigue. Pour cette raison je choisis ceux avec qui je travaille et je passe du temps avec chacun d’entre eux, ainsi que sur le chantier du bateau.

L’anticipation est aussi source de sérénité, même si on ne peut pas tout prévoir !

Anticiper les problèmes techniques et savoir comment les résoudre, anticiper les soucis médicaux et connaître les gestes essentiels, anticiper la communication de crise et savoir qu’un dispositif est en place pour informer qui de droit et activer les solutions nécessaires…

Quelles règles élémentaires appliques-tu face à une situation de crise en mer ?

Ne jamais céder à la panique
Rester calme, lucide, concentré
Réceptionner le problème, analyser la situation
Se faire confiance à soi et à son instinct de survie !

Source : TB Press