Alex Thomson, Charlie Dalin, Thomas Ruyant et Kevin Escoffier s’apprêtent à basculer dans l’Alizé

 

Jérémie Beyou est arrivé en début d’après-midi sur les pontons des Sables-d’Olonne, ému et les traits tirés par la déception. Dans le même temps, la tête de flotte, toujours menée par Jean Le Cam, file à vive allure vers l’Alizé. Les « foilers » pourront bientôt exprimer tout le potentiel de leur IMOCA. « Ils vont faire parler la poudre » s’amuse Kevin Escoffier. Les retardataires, eux, sont toujours encalminés à cause du manque de vent. 

 

Crédit : JM Liot

L'envol des Foilers

Après avoir contourné la dépression tropicale Thêta, la tête de flotte bénéficiait encore de 15 à 20 nœuds durant la journée. Leur mission ? Empanner pour assurer la transition entre le vent de Nord à Nord-Ouest et l’Alizé qui souffle d’Est, Nord-Est. Il y a une expression pour ça : adopter une trajectoire en forme d’aile de mouette. Et il n’en fallait pas plus pour que les « foilers » prennent leur envol. Situé le plus à l’Ouest, Charlie Dalin (Apivia) est le premier à empanner quand Thomas Ruyant (LinkedOut) et Kevin Escoffier (PRB) ont fait des bords pour y parvenir. À 150 milles au Sud-Ouest du quatuor, Jean Le Cam (Yes We Cam!) et Alex Thomson (HUGO BOSS) ont empanné en début d’après-midi. Ils bénéficiaient ainsi d’un meilleur point d’empannage et donc d’une route légèrement plus directe.
 
« Après, ça va faire parler la poudre, s’amuse le skipper de PRB. Ça va être un long bord tout droit vers le pot au noir et les ‘foilers’, qui n’ont pas encore eu l’occasion de montrer leur potentiel, vont enfin pouvoir le faire. Ça va envoyer du bois ! » Thomas Ruyant, interviewé en direct dans le Vendée Live, corrobore : « on va pouvoir fermer les angles et commencer à accélérer. »
 
Car pour l’instant, le pot au noir est très peu actif, une aubaine. Le groupe de tête devrait atteindre l’Alizé dans la nuit.

 

Le "Roi Jean" suscite l'admiration  

Devant ces foilers de dernière génération, il y a donc un homme de 61 ans à bord d’un bateau âgé de 12 ans qui a gagné le Vendée Globe en 2008-2009. Jean Le Cam, qui a repris la tête du classement à la mi-journée, bénéficiait toujours de 21,5 milles d’avance sur Alex Thomson. Chez les autres skippers, Le "Roi Jean" forçait l’admiration. « Jean est incroyable. Être là où il est avec ce bateau et à son âge, c’est brillant », s’enthousiasmait Alex Thomson.
 
Maxime Sorel (V and B – Mayenne), lui aussi à bord d’un bateau à dérive droite, ne dit pas autre chose : « sa trajectoire est très osée. Il fait le moins de manœuvres possibles et il change peu de voiles et ça aussi, c’est très osé ! ». « Forcément, Jean est un peu émoussé par cette décharge d’effort, expliquait Jacques Caraës, le directeur de course. Mais il démontre à quel point l’expérience des mers du Sud est précieuse : il a moins d’appréhension, il connaît plus ses limites et celles de son bateau. » Autre skipper à bord d’un bateau à dérives droites à impressionner : Benjamin Dutreux, 31 ans de moins que Le Cam et 3e du moment pour son premier Vendée Globe.

 

Ils ont pris le bon train 

 Derrière les cinq premiers, ils sont vingt à avoir pris le « bon train » et à s’extraire progressivement des vents forts de Thêta. Parmi eux, il y a Sam Davies, heureuse ce matin de profiter enfin d’un soleil éclatant après « s’être échappée de la dépression ». « Je ne voulais pas trop pousser le bateau, j’ai essayé de bien me placer. » Seule alerte sur le bateau ? Une boite de sardines qui « a explosé dans un sac de nourriture ». « La pire des catastrophes » s’amuse-t-elle. Romain Attanasio est bien placé aussi, lui qui a enfin profité de sa première boisson chaude – un thé – et de son premier petit-déjeuner. « Le beau temps arrive, on va pouvoir faire tomber les fringues, expliquait le skipper de PURE-Best Western Hotels & Resort. J’ai enlevé mes bottes seulement 2 à 3 heures ! ».

 

Derrière, il y a la molle qui revient

Être compétiteur, vouloir traverser les mers du globe et se retrouver englué dans 4 nœuds de vent… C’est ce qu’affronte la queue de peloton à l’instar d’Ari Huusela (Stark), de Miranda Merron (Campagne de France), d’Alexia Barrier (TSE – 4myplanet), de Clément Giraud (Compagnie du Lit / Jiliti), de Sébastien Destremau (Merci) et d’Armel Tripon (L’Occitane en Provence). Et ce n’est pas fini. « Le couloir de vent entre la dépression et le front au-dessus s’est quasiment cassé, décrypte Christian Dumard, le météorologue du Vendée Globe. Ils sont au cœur d’une zone sans vent et derrière, il y a la ‘molle’ qui revient. Ça ne va pas être très réjouissant. » Pourtant, Armel Tripon voulait garder le sourire comme il l’a confié dans la matinée : « Il y aura des moments plus opportuns pour revenir, la route est longue. Et c’est sympa d’être là, de faire du bateau, de voir toutes les étoiles, c’est super beau. »

 

En milieu d’après-midi, l’équipe DMG Mori Global One a communiqué sur une avarie à bord du bateau de Kojiro Shiraishi. Jérémie Beyou a remonté le chenal ce samedi, du monde était là pour l’acclamer mais il voulait être « partout, sauf ici ». 
 

CLASSEMENT 18:00 (heure française)
1. Jean Le Cam – Yes We Cam! à 22 813.5 milles de l’arrivée
2. Alex Thomson – HUGO BOSS à 14.91 milles du leader
3. Benjamin Dutreux – OMIA – Water Family à 27.44 milles du leader
4. Kevin Escoffier – PRB à 73.66 milles du leader
5. Damien Seguin – Groupe APICIL à 81.55 milles du leader
Source : O Connection