Mise à l'eau du nouvel IMOCA Malizia Seaexplorer, Boris Herrmann : « Cette coque ne se brisera jamais »

 Dans le monde en plein expansion de l’IMOCA, il existe différents formats d'équipes : françaises ou internationales, grandes ou petites et avec plus ou moins de budget. L’une d'entre elles se distingue par l’ensemble des personnes qui prennent part au projet du skipper allemand Boris Herrmann ; c’est le Team Malizia.

 

Crédit : Polaryse 

 




Cette équipe IMOCA est l'une des cinq ou six qui se préparent à la fois à The Ocean Race, dont le départ sera donné d'Alicante (Espagne) le 15 janvier 2023, et au prochain Vendée Globe qui s’élancera le 10 novembre 2024.
 
Un programme colossal pour le Team Malizia qui s’est donc développé en conséquence. Actuellement, c'est l'une des plus grandes équipes à Lorient, avec 45 personnes qui y travaillent, alors que le nouveau plan VPLP est sorti du hangar H2 pour la première fois ce mardi 19 juillet.
 
Malizia - Seaexplorer a un calendrier de navigation très dense pour les prochains mois, avec le Défi Azimut - Lorient Agglomération en septembre, suivi de la Route du Rhum - Destination Guadeloupe en novembre, puis d’une transatlantique retour afin de s’aligner en janvier au départ de The Ocean Race. Le travail à fournir afin que le bateau soit prêt d’ici les premiers défis est donc énorme.
 

L’auberge espagnole 

L’équipe est actuellement composée de 11 nationalités et la plupart de ses membres sont venus en Bretagne spécialement pour répondre à l'appel de Boris Herrmann. Aussi, ils sont peu à vivre chez eux. "Nous venons de partout dans le monde mais nous ne sommes pas installés à l’hôtel pour autant,” explique Holly Cova, britannique et directrice de l'équipe qui travaillait auparavant comme avocate spécialisée dans la finance d'entreprise.
 
"Ce n'est pas comme si nous étions une équipe française où souvent tout le monde est basé ici", ajoute-t-elle, "nous vivons donc tous ensemble. Nous avons loué cinq maisons à Lorient et je vis dans l'une d'elles avec sept d'entre nous. C'est une équipe jeune - j'ai 32 ans et Louis (Viat, le team manager notamment en charge de la construction du bateau et de l’équipe en France) en a 36. C’est donc une organisation et une ambiance un peu différentes je pense."

 

Deux défis en un 

L'autre chose qui les distingue est le type de management particulièrement horizontal mis en place au sein de l’équipe. Boris est toujours le skipper mais il ne se définit pas comme un patron traditionnel. "En fin de compte, lorsqu'il s'agit d'une course en solitaire, c'est toujours son bateau et son projet, mais il tient beaucoup à ce que ce soit le Team Malizia et pas seulement lui", poursuit Holly. “Par exemple, il ne fera pas deux étapes de The Ocean Race et Will (Harris, ancien marin du circuit Figaro et co-skipper de Boris depuis 2019) sera le skipper lorsque Boris ne sera pas à bord. Quand vous naviguez, il arrive toujours un moment où une personne doit prendre une décision et ce sera toujours Boris, mais il y a l'apport de chacun et il ne veut pas être skipper tout-puissant."
 
L’équipe ne fonctionne pas non plus en divisant les responsabilités ou en fixant des objectifs différents entre chacun des deux grands objectifs sportifs. Le nouveau bateau a été construit pour répondre aux besoins des deux courses, sans modifications importantes, et l'équipe travaille sur les deux campagnes en même temps. Ils considèrent qu'un défi les conduit et les prépare au suivant.
 
"Nous considérons que les deux courses sont très complémentaires", explique Holly. "Bien sûr, l'une se fait en solitaire et l'autre en équipage, mais l'opportunité de naviguer à plusieurs dans les mers du Sud sur The Ocean Race, par exemple, est quelque chose de nouveau et d'excitant qui permettra de tester le bateau à l'extrême avant le Vendée Globe. À mon avis, les autres skippers qui ne participent pas manquent une grande opportunité d’avoir ce parfait banc d'essai pour le Vendée Globe. Nous ne voyons pas seulement cela sur l’aspect sportif mais également pour nos partenaires, avec toutes les possibilités d'activation que cela offre sur les escales."

 

Un tour du monde en équipage au visage nouveau 

L'équipe de Boris Herrmann sait qu'il lui appartient, ainsi qu'à ses concurrents qui participent à The Ocean Race pour la première fois, de prouver que c'est possible et qu'il n'est pas nécessaire d'engager des dépenses illimitées pour faire naviguer un bateau et gérer l'équipe technique sur ce parcours de sept étapes. En fait, en ce qui concerne le budget, ils pensent à la façon dont les choses se faisaient dans les premières années de la légendaire course autour du monde en équipage.
 
"Ce sera à nous et aux autres équipes inscrites de prouver que c'est possible avec un budget IMOCA et non un budget typique de la course au large internationale", ajoute Holly. "Cette course sera très différente de la précédente édition : nous n'allons pas expédier quatre conteneurs de matériel autour du monde. Nous allons le faire dans notre propre style et oui, ce sera amusant, peut-être un peu plus comme l'ancienne Whitbread."

 

Sept sponsors unis au même niveau pour le climat 

Une autre caractéristique intéressante est la façon dont l’équipe a rassemblé une famille de sept partenaires qui sont tous à peu près au même niveau. En effet, dans une Classe où les bateaux n'ont souvent qu'un seul sponsor principal, le Team Malizia est soutenu par son partenaire fondateur, le Yacht Club de Monaco, par EFG International (banque suisse), Zurich Group Germany (multinationale suisse de l'assurance), Kuehne+Nagel (logistique germano-suisse), MSC (société suisse de transport par conteneurs), Hapag-Lloyd (société allemande de transport par conteneurs) et Schütz (société allemande d'emballage et de matériaux).
 
Boris Herrmann et Holly ont travaillé avec l’ensemble de ces acteurs pour les rassembler derrière l'engagement fondamental que l'équipe porte en faveur de la santé des océans et de la nécessité d'un changement de politique en matière de climat, comme le résume leur slogan : "A Race We Must Win. Climate Action Now" qui figure sur les voiles de Malizia - Seaexplorer.
 
"En France, c'est un peu différent, mais en Allemagne, il n'est pas si courant qu'une entreprise sponsorise un grand projet de voile", confie Holly Cova. "Pour nous au sein de l’équipe, il est fondamental de porter un message plus grand sur le changement climatique et l'action en faveur des océans. Il est donc devenu évident que si nous voulions conserver ce message - en fait, nous sommes allés beaucoup plus loin dans notre stratégie de marque - il fallait que les partenaires s'unissent et qu’ils ne voient pas seulement un grand panneau d'affichage avec leur nom flottant dessus mais l’objectif supérieur de la prise de parole commune sur ce sujet."
 
C’est ainsi fascinant que ce projet ait réussi à attirer trois grands concurrents dans le même secteur – la logistique mondiale. La clé a été d'identifier un intérêt commun. "Ils nous ont dit : 'quand il s'agit du climat, nous devons nous unir'. Il ne s'agit pas seulement de se faire concurrence sur tous les plans. C'est pourquoi cela fonctionne", résume Holly.

 

Boris Herrmann : « Cette coque ne se brisera jamais » 

Comme beaucoup de ses rivaux au sein de cette dernière génération de foilers, ce nouveau bateau bénéficie d'un traitement particulier de l'étrave qui a été conçue pour éviter le décrochage dans des conditions de vent portant fort. Cet IMOCA a également été construit avec la fiabilité structurelle comme objectif principal. Boris Herrmann dit de lui que c'est un cuirassé. "Très solide - très, très solide dans tous les sens du terme", déclare le skipper qui a terminé cinquième du dernier Vendée Globe et s'est créé une communauté de fans dans le monde entier grâce à son style de communication facile et accessible. "La frontière entre léger et lourd est probablement ténue et je dirais qu'avec ce bateau, nous avons toujours essayé d'être exactement sur la bonne ligne d’équilibre. Mais, à la rigueur, nous sommes quand même un peu plus du côté solide et robuste pour de nombreux systèmes."
 
Selon lui, ce bateau a une structure de coque qui ne faillira pas. "À la fin, j'avais beaucoup de confiance dans mon ancien bateau (VPLP/Verdier de 2015 - Gitana 16, maintenant appelé Fortinet-Best Western), mais celui-ci est encore à un autre niveau. Je ne m'inquiéterai jamais pour la coque - cette coque ne se brisera jamais structurellement nulle part - je suis super confiant à ce sujet."
 
Boris affirme aussi que la taille actuelle de l'équipe ne durera pas au-delà de The Ocean Race. "Nous nous sommes adaptés à la nécessité de ce que nous faisons d'une certaine manière", explique-t-il. "Il n'est pas prévu de rester à 45 personnes pendant quatre ans. Bien sûr, la période de pointe de la charge de travail est cet été, pour mettre le bateau en service et le faire fonctionner rapidement. Ensuite, il y a encore beaucoup de choses à faire pendant The Ocean Race. Après cela, nous reviendrons à une organisation IMOCA plus normale".

 

Source : IMOCA