Entre Saint-Nazaire et Progreso, les vingt-quatre Class'40 vont devoir composer avec des situations météorologiques très variées. Et le format d'une course en double ajoute à l'originalité du parcours. Des habitués du circuit des 40 pieds analysent les particularités de ce parcours et de ces bateaux créés il y a seulement cinq ans...
Ce ne sont pas seulement 5 000 milles à parcourir, c’est d’abord un golfe (de Gascogne), puis un océan (Atlantique), ensuite une mer (des Caraïbes) et de nouveau un golfe (du Mexique) ! Soit quatre phases, quatre stratégies, quatre rythmes, quatre relances. Car à chaque tranche de parcours correspondra une situation météorologique, plus ou moins perturbée par la proximité des côtes, la température de l’eau, l’humidité ambiante… Et pour chaque tandem, ces quatre morceaux de « gâteau » n’auront pas la même saveur : parce que le soleil cogne fort au large du Mexique, parce que les alizés sont plus au moins établis à l’approche des Antilles, parce que la grande houle océanique et le brassage dépressionnaire rendent la mer dure ou coopérative, parce que le « dégolfage » jusqu’au cap Finisterre incite à la veille permanente en raison du trafic maritime. Passer d’un stade à l’autre, gérer ces transitions qui ne sont pas seulement météorologiques mais aussi psychologiques, s’adapter à l’évolution temporelle et accepter les choix des autres concurrents sans douter, voilà quelques-unes de spécificité de cette Solidaire du Chocolat !
Dilemme avant même le coup de canon
Sur cette transat entre Saint-Nazaire et Progreso, il y a d’ailleurs des options à prendre avant même le départ puisque les duos ne peuvent emporter que huit voiles : le dilemme touche à l’embarquement d’une trinquette (petite voile d’avant) ou d’un spinnaker ou d’un gennaker ! Car si chaque duo va logiquement se positionner en fonction de la météo prévue, ce qui est relativement aisé pour la première semaine de course où les prévisions sont claires, il y a près d’un mois de mer et il est donc impossible de savoir à quelle sauce les Class’40 seront mangés ! Il faut donc s’attendre à une dispersion de la flotte en plusieurs groupes avant même d’atteindre la longitude des Açores, l’île de Florès (la plus au Nord-Ouest de l’archipel) étant à laisser à tribord. Il y aura donc au moins une, voire plusieurs dépressions à négocier : « Physiquement, ce sont des bateaux exigeants, particulièrement au près où ils tapent beaucoup dans la mer. Mais ils sont très réactifs dès qu’ils glissent : nous avons déjà fait des pointes à 23-24 nœuds ! On arrive à tenir des vitesses élevées assez longtemps. »
Mais si par effet d’entonnoir, tous les tandems vont de l’autre côté de l’Atlantique, converger ensuite vers l’île de Saint Barthélemy (à laisser à tribord), il y a encore beaucoup de route et beaucoup de rebondissements possibles… « C’est un des plus longs parcours proposé sur une transatlantique : une Route du Rhum, plus une « couche » tout de même assez longue jusqu’à Progreso… C’est un tracé intéressant en termes de stratégie parce qu’il peut se passer beaucoup de choses sur la route, particulièrement une fois arrivé aux Antilles ! On peut y rencontrer des calmes, très différents des vents de l’Atlantique. Et il y un courant océanique non négligeable dans ces zones-là… Il y a donc une part d’inconnu jusqu’au Mexique, ce qui est bien pour la course et pour les coureurs. » Mais a priori sur ce parcours de 5 000 milles, l’essentiel devrait s’effectuer au vent portant.
Des habitués du Class’40
« Cela fait longtemps que nous n’avons pas vu autant de Class’40 sur une même ligne de départ ! Et le niveau a très rapidement monté ces deux dernières saisons. La Solidaire du Chocolat va donc être sportivement très attrayante même si on sait que la nouvelle génération est plus optimisée et à certaines allures, nous avons un déficit de près d’un nœud... »
Côté coureurs, la très grande majorité des tandems accumule déjà une grosse expérience de ces voiliers, certains avec en sus un cursus en monocoque Imoca 60’ ou en 50 pieds (Bernard Stamm, Patrice Carpentier, Giovanni Soldini, Richard Tolkien, Miranda Merron…), d’autres plusieurs saisons en Figaro (Olivier Krauss, Pietro d’Ali, Marc Lepesqueux…), nombre un palmarès en Mini Transat (Armel Tripon, Yvan Noblet, Benoît Parnaudeau, Adrien Hardy, Tanguy de Lamotte…). Presque tous ont déjà effectué des transats, en course ou en convoyage. « Ce ne sera pas une course avec seulement un petit nombre de favoris ! Même si en regardant les résultats de la saison qui vient de s’écouler, on constate que Giovanni Soldini, Tanguy de Lamotte et Bruno Jourdren sont en pole position… D’abord il ne faudra pas oublier un nouveau bateau parce qu’il était en phase de préparation, celui de Thierry Bouchard et Olivier Krauss. Et il y a bien d’autres prétendants, parce que les Class’40 sont bien affûtés et qu’un grand nombre d’équipages connaît bien sa monture : il faut au moins prendre en compte une douzaine de candidats à la victoire ! Le terrain de jeu est suffisamment piégeux pour ouvrir le match… »
La phase de préparation touche à son terme à Saint-Nazaire et l’activité sur les Class’40 est désormais plus tournée vers les associations solidaires et les animations proposées par la Solidaire du Chocolat pour faire découvrir aux écoliers et aux collégiens, le monde de la mer, de la voile et de la course. Car la force d’un voyage maritime est aussi sa capacité à transporter au-delà des mers, des horizons, des contraintes, le rêve et la projection dans un autre monde…
Source : La Solidaire du Chocolat