Transat Bénodet Martinique / Dépressions sous haute tension

Changement de physionomie en ce vendredi sur la flotte de la Transat Bénodet - Martinique. Ainsi, à la faveur d'un petit décalage, le groupe des "sudistes" a-t-il pris les devants, offrant au bizuth Frédéric Rivet (Vendée 1) les honneurs du classement, devant Eric Péron (Macif 2009) et Nicolas Lunven (Generali). De retour à des conditions de navigations bien plus propices à un gain sur la route, les solitaires soufflent un peu et tentent de reconstituer leur capital sommeil. L'épisode de pétole est derrière eux, mais devant, la succession de deux dépressions annonce des heures plus sombres.

Crédit : A Courcoux

La tendance était dans l'air depuis quelques jours et le premier classement de la matinée est donc venu confirmer les faits. Touchant les dividendes de leur décalage, les partisans du Sud ont donc pris la tête des opérations en ayant réussi à garder toujours plus de pression que leurs concurrents pendant cette phase de transition marquée par la pétole. Ainsi, aux premières heures du jour, Frédéric Rivet, le petit nouveau de l'Atlantique, s'est-il offert le luxe mérité d'une place en haut de l'affiche. Pour sa première traversée, le Vendéen affichait une satisfaction légitime à l'occasion de la vacation de la mi-journée, mais savait bien qu'à ce stade de la partie les jeux étaient loin d'être faits et qu'ils étaient même en passe d'être sérieusement relancés. Néanmoins, le solitaire ne boudait pas son plaisir d'être à si belle fête. Derrière lui, Eric Péron (Macif 2009) prenait la deuxième place à la faveur d'une inspiration proche du nouveau leader. En troisième position, Nicolas Lunven jouait des coudes à l'Ouest et démontrait qu'il s'était, à l'image de ses compagnons de route, finalement sorti sans trop d'encombres de ces longues heures à scruter la moindre évolution du vent. Pour tous, du premier au dernier, Louis-Maurice Tannyères (ST Ericsson), la première semaine de course devrait s'achever sur le constat d'une belle homogénéité, avec seulement cinquante-cinq milles d'écart. Autant dire que la clôture de ce premier chapitre appelle une nouvelle distribution des cartes et que les cent milles de distance en latéral qui séparent les solitaires les plus "extrêmes" du moment sont voués à se réduire considérablement. La question sera alors de savoir quel groupe croisera le premier au passage des Açores...

Se préparer au gros temps
En attendant, plus que le contentement ou le fatalisme, c'est surtout l'inquiétude qui régnait dans les conversations du jour avec le PC Course parisien. En cause, une succession de deux dépressions qui devraient générer des vents violents et dont le comportement précis laisse planer beaucoup d'incertitudes. Les vents d'Est Nord Est modérés dont bénéficient les dix sept solitaires en ce moment devraient donc laisser la place à un volet beaucoup plus corsé dans la journée de demain, au fur et à mesure de leur progression vers le système dépressionnaire. Le temps deviendra alors beaucoup plus instable avec l'enchaînement d'épisodes pluvieux, d'un vent d'Est force 5 et de puissantes rafales allant jusqu'à 6 Beaufort. Après une courte accalmie dans la journée de dimanche, le programme se corsera violemment lundi, au passage d'une dépression secondaire à l'Ouest des Açores que le météorologue de la course qualifiait ce midi de "petite bombe". Deux cas de figurent pourront alors se présenter ; le premier obligeant les solitaires à affronter le phénomène de plein fouet et devoir négocier des vents très forts. En revanche, si la dépression devait passer plus à l'Est qu'initialement envisagée, la flotte trouverait des conditions favorables. L'évolution sera à donc à scruter de très près sur l'Atlantique. Face à cette situation inhabituelle sur le parcours et à "l'inversion" de l'ordre des rencontres avec les anticyclones et les dépressions, les concurrents sont prêts. Tous savent qu'ils doivent l'anticiper en soignant leur alimentation, le sommeil et leur matériel. La gestion des hommes et des machines sera alors la carte maîtresse pour gagner son ticket vers la Martinique.

Frédéric Rivet (Vendée 1)
"Je suis plutôt satisfait. J’étais content de cette option que j’avais un peu dessinée avant le départ et pendant les premières heures de course. 1-0 c’est pas mal.
Mais le problème est que maintenant on est passé à l’étape suivante et que la dépression nous bloque un petit peu la route et ce coup-ci c’est peut être par le Nord que ça va repasser. Dans un premier temps on ne s’emballe pas parce que je pense que la course risque d’être relancée assez rapidement.
Clairement, la dépression qui était un petit peu dans le Sud-Ouest à tendance à monter un petit peu et du coup c’est bien dommage parce que si elle était restée un peu en bas, ça aurait été vraiment l’opération jack pot. Mais là, elle a plutôt tendance à remonter donc du coup on va aller jouer dans les îles des Açores, à Santa Maria, et puis c’est vrai qu’on aura un passage un peu violent au niveau du vent. Mais c’est encore dans un délai assez long donc on va regarder ça avec attention et surveiller, parce que s’il y a du vent, il faut préparer le bateau pour ça.
Jusqu’à présent les situations sont assez marquées donc on arrive à bien les déchiffrer. Maintenant c’est vrai qu’en Figaro on subit vraiment les phénomènes suivant la vitesse à laquelle ils se déplacent
C’est un peu là où j’apprends, j’essaye de m’adapter, de bien me positionner. J’essaye surtout de ne pas m’emballer dans mes choix, d’être raisonné, de laisser un peu de temps pour voir comment ça évolue avant de partir dans une option extrême. C’est un peu ça ma difficulté mais bon j’apprends, je suis là pour çà, je l’avais dit au départ et pour le moment ça se passe plutôt bien
".

Eric Péron (Macif 2009)
"Je suis un peu sous le coup de ces deux derniers jours où c’était compliqué, à cause de l'absence de vent. Du coup, fallait être dessus. Et là, je n’en suis pas encore sorti. Ce matin, je ne savais plus qui j’étais. J’ai donc fait des siestes et après je suis revenu. Il faut que j’arrive à trouver un vent stable pour pouvoir m’extirper de cette situation. En dessous, ils ont plus de vent que moi. Ca devrait durer une dizaine d’heures. Ensuite, on va devoir négocier un coup de vent qui arrive du nord. Ca va être coton, mais ça ne va pas durer éternellement. Mais, on va s’en prendre un bien fort ! Ca va être la grosse difficulté à négocier pour ne pas faire de casse. Après, dans les Alizés, on aura du vent portant, 20 à 25 nœuds en direction de la Martinique. Une trajectoire assez tendue, avec des empannages par ci, par là. Le plus gros là, ça va donc être dans les deux prochains jours. 
Depuis le début de la course, j’ai passé un seul coup de fil, mais j’ai pas vraiment eu le temps. J’attends que le temps s’installe pour le faire".

Fabien Delahaye (Port de Caen Ouistreham)
"Je ne me suis pas beaucoup reposé ces dernières vingt quatre heures. J’ai beaucoup barré dans cette période de transition où il n'y avait pas beaucoup de vent. La deuxième partie de la nuit dernière, je me suis octroyé du repos car j’en avais bien besoin. Je suis revenu sur le paquet qui avait de l’avance, au bon moment. Je suis donc plutôt satisfait. Je suis revenu fort cette nuit sur Thomas Rouxel et Gildas Morvan et sur ces deux dernières heures, je suis entrain de les passer sous le vent en étant décalé un peu dans l’Ouest. Et là, je commence à repasser devant. Je voyais, ça ne se passe pas mal aussi au niveau positionnement par rapport à ceux de l’Est. On fait un beau croisement pour aller vers les Açores. Le vent est rentré et c’est déjà ça.
J’ai eu en effet, surtout hier et la nuit dernière, Jeanne et Romain par la VHF. On a parlé de tout et de rien. Ca change d’atmosphère aussi. On a discuté également de ce que l’on pensait chacun de nos positions dans ce coin là. On ne se cache rien. On discute, on partage. On se connaît bien.
Mon spi est sorti. Toutes voiles dehors. Je pense et j’ai eu des échos, que la Normandie suit cette course. J’essais de faire au mieux (pour eux). Le soleil, on n'en a pas eu beaucoup depuis le départ. Il y a deux jours un tout petit peu, ce qui m’a permis de sortir le panneau solaire. Mais là, actuellement, c’est couvert
".

Classement au 15/04/2011 à 16:00
1 Frederic Rivet VENDEE 1 à 2592.0 milles du but
2 Eric Peron MACIF 2009 à 6.8 milles du leader
3 Nicolas Lunven GENERALI à 15.3 milles du leader
4 Eric Drouglazet LUISINA à 15.8 milles du leader
5 Erwan Tabarly NACARAT à 17.3 milles du leader
6 Fabien Delahaye PORT DE CAEN OUISTREHAM à 18.7 milles du leader
7 Thomas Rouxel BRETAGNE - CREDIT MUTUEL PERFORMANCE à 19.4 milles du leader
8 Gildas Morvan CERCLE VERT à 20.2 milles du leader
9 Romain Attanasio SAVEOL à 21.7 milles du leader
10 Jeanne Grégoire BANQUE POPULAIRE à 25.5 milles du leader

Source : Rivacom