Transat Bénodet Martinique / Les arrivées se succèdent à Fort-de-France (Images)

Après le final époustouflant offert, hier, par les cinq premiers, les arrivées continuent de se succéder à Fort-de-France. Cette nuit et aujourd'hui, l'euphorie a cependant laissé la place à des sentiments plus contrastés sur les pontons martiniquais. Si certains ne cachaient pas leur satisfaction d'avoir bouclé cette transat menée tambour battant avec l'impression du travail bien fait, d'autres avouaient leur frustration de ne pas avoir pu jouer aux avant-postes, souvent la faute à des blessures ou à des avaries.

© Alexis Courcoux

 « Sur une transat de ce type, on vise la victoire ou le podium, après, que l’on soit quatrième ou quinzième ne change pas foncièrement les choses ». La phrase, lâchée non sans cynisme, est de Gildas Morvan (Cercle Vert). Le tenant du titre, 9e de cette Transat Bénodet – Martinique, n’a donc pas réitéré sa performance de 2009. Il a toutefois réussi le pari fou de traverser l’Atlantique malgré un étai brisé dès le cap Finisterre. « A partir de cet instant, mon objectif a été d’arriver de l’autre côté, de ramener le bonhomme et le bateau à bon port. Le risque était grand de voir le mât tomber. J’ai bricolé ce que j’ai pu mais ça n’a pas tenu. Ca a été une grosse déception de repartir à nouveau dans cette galère. Il fallait faire attention au matériel en permanence, éviter les départs au lof et les mauvaises manœuvres… Du coup, j’ai dû jouer un cran derrière : dur ! » a confié le marin des Abers, déçu de ne pas avoir pu défendre ses chances.

Sentiment partagé par celui qu’il a doublé dans la nuit de lundi à mardi, Anthony Marchand (Bretagne – Crédit Mutuel Espoir). Ce dernier a, pour sa part, dû faire face à des soucis d’ordinateur. Plus de météo et plus de position donc. Plus non plus de spi et de bas hauban. « Mon D1 a lâché à deux milles de l’arrivée. Le mât a cintré et j’ai bien cru que c’était terminé » a expliqué le plus jeune concurrent de l’épreuve, reconnaissant par ailleurs avoir beaucoup appris de lui en seize jours de mer, à l’image du Portugais Francisco Lobato (Roff), 8e.

© Alexis Courcoux

 
Un peu plus tôt, et dans un autre registre, Eric Péron (Macif 2009) révélait avoir vécu un « véritable petit calvaire », selon son expression, dans la deuxième partie du parcours. On s’en souvient, le Finistérien s’est fait une entorse au genou lors du coup de vent qui a cueilli les solitaires peut après les Açores, ruinant ainsi ses rêves de podium. C’est cela qu’aura démontré cette transat. Menée à hautes vitesses, elle a extrêmement sollicité les bateaux et les marins.

© Alexis Courcoux


« On en a parfois un peu bavé. Ca a été rapide, c’est vrai, mais ça aussi et surtout été dur. C’était chaud tout le temps ! », a détaillé Romain Attanasio (Savéol), 6e à amarrer son Figaro Bénéteau 2 à la pointe Simon, sous les grains qui balayent les Antilles ces derniers jours. On l’aura compris, pour ceux-là, l’issue de la course n’est pas celle qu’ils avaient rêvé. Mais quand, sur dix-sept bateaux au départ, tous au presque peuvent prétendre au podium, une sélection s’effectue forcément à un moment donné. Quoi qu’il en soit, pour tous, la satisfaction du travail bien fait est là. Chacun à tout donné. La hiérarchie des "combats" des uns et des autres s'établit donc petit à petit sur les quais et donne lieu à ces discussions sans fin qui alimenteront encore longtemps les belles soirées des marins. En attendant, quatre d’entre eux restent encore en mer. Et pour ceux-là, l’essentiel, avoué à Bénodet, est simplement de rejoindre « l’autre côté ». Ils sont en passe de réussir leur challenge.

© Alexis Courcoux



En effet, d’ici à demain, la flotte devrait être au complet à l’îlôt Fleurs qui vient de faire toute la démonstration de son accueil et de sa chaleur en accueillant magistralement l’enfant du pays, Eric Baray (Ven Dan Vwel 972), auteur d’une jolie 11e place dans sa première épreuve en Figaro Bénéteau.

Ils ont dit :

Jeanne Grégoire (Banque Populaire)
« Je suis super contente d’arriver tout près des copains et super contente parce que la course était vraiment plaisante. C’était super intéressant sur les plans sportifs et stratégiques. Je me suis éclatée à bord car j’avais plein de petites choses à faire qui me plaisaient. Mon résultat me va bien parce que les gars devant ont navigué un cran au dessus de moi dans la brise. Pour une transat de gros bras, je ne m’en sors pas si mal que ça... J’ai fait exactement la route que je voulais sauf quand je n’arrivais pas à attaquer dans du vent fort. J’ai pris du plaisir, j’ai fait des photos, des petits films… ma petite vie tranquille sur le bateau quoi ! J’ai fonctionné beaucoup au feeling, je ne voulais surtout pas me prendre la tête. Ca a quand même été un peu le cas ces dernières 24 heures parce que c’était vraiment serré. Mais globalement, c’était parfait. »

Gildas Morvan (Cercle Vert)
« Je suis content d’arriver. Après la casse de mon étai, l’objectif était d’essayer de traverser, de ramener le bonhomme et le bateau à bon port, avec le mât si possible. Cette partie est accomplie. Le risque était grand de voir le mât tomber en plein milieu de l’Atlantique. Ca aurait été un peu tendu. J’ai bricolé ce que j’ai pu en tordant l’étai et en faisant une espèce de deuil pour remonter le remettre en place. Je me suis arrêté à Santa Maria pour ça, tout était fixé et je suis reparti confiant. Malheureusement, dans le passage de la dépression, avec le vent fort qu’il y a eu, l’ensemble n’a pas tenu et c’est retombé au bout de deux jours. Ca a été une grosse déception de repartir à nouveau dans cette galère. Il fallait alors faire attention au matériel en permanence, éviter les départs au lof et les mauvaises manœuvres… Ce n’est pas très agréable car quand on part sur une course comme celle-ci, forcément, on veut jouer la gagne, surtout quand on a remporté la derrière édition. L’idée pour moi, c’était vraiment de jouer dans la bagarre finale. Jouer un cran derrière, c’est un peu dur mais c’est la vie. Sinon, j’ai regardé régulièrement ce qu’il se passait devant. Je ne sais pas ce qu’ont fait Erwan Tabarly, Thomas Rouxel et Fabien Delahaye. Ils ont laissé partir Nicolas Lunven qui s’est décalé à un moment et qui a réussi à ressortir par devant en bâbord. C’était un joli coup ! »

Francisco Lobato (Roff)
« J'avais vraiment hâte d'arriver. Ca n'a pas très bien marché pour moi au cap Finisterre, j'ai perdu mon grand spi et mon petit spi. Dès le début j'avais un handicap, je savais que je n'allais plus luter pour les premières places. Psychologiquement c'était un peu dur, je me suis même mis en pause aux Açores. Je n'étais pas très inspiré dans mes options. Après je me suis un peu reposé, j'ai essayé de dormir et de profiter. C'est vrai qu'à la fin j'avançais vite. J'ai encore appris des choses sur le bateau et je pense que ça va me servir pour l'avenir. La dernière semaine, je sens qu'elle m'a servi à quelque chose. Je me sens en confiance. Il me manquait un petit peu d'expérience. Je n'avais pas encore vécu des longues courses avec beaucoup de portant où il fallait lever le pied sur le Figaro. Le mini 6.50, je le connaissais très bien, c'est comme ça que j'ai pris l'avantage par rapport aux autres. Je savais quand il fallait réduire, quand il fallait changer de voile. Cette course m'a servi à apprendre ça. Nicolas Lunven et ceux qui étaient devant ont vraiment bien navigué. Ils méritent leur place. J'ai vraiment envie de bien continuer dans la saison. »

Source : Rivacom