ITW / "Humide, mais fabuleux" dixit Franck Cammas en éclaireur de la Volvo Ocean Race

Les Français de Groupama ont atteint la 55e latitude sud et devancent de 37 milles les Américains de PUMA. Le vent rentre et leurs autres adversaires sont en difficulté. Notamment Telefónica, qui vient d’annoncer un pit-stop à Ushuaia.


La dépression qui a frappé la flotte la semaine dernière revient. Elle frappe les concurrents qui descendent maintenant vers le Cap Horn dans 40 nœuds de vent d’ouest. Devant, Groupama sailing team et PUMA Ocean Racing ont dépassé le dernier waypoint de la limite de glaces. Pour eux, ce fort flux est la garantie d’un long bord de portant jusqu’au Horn, qu’ils devraient atteindre d’ici deux à trois jours.

Franck Cammas lors de la visioconférence de ce mardi midi.
« On aurait aimé que ça se passe plus facilement, et c'est à la hauteur de ce que nous avions imaginé. On a eu une nuit difficile avec une mer à nouveau très grosse. Il a encore fallu lever le pied pour ménager le bateau et les hommes. C'est la semaine la plus rude depuis le départ de la Volvo Ocean Race. Nous étions plus en condition de survie qu'en régate. L'eau est à 5°C en ce moment : vivement qu'on passe le cap Horn et qu'on remonte, parce que nous sommes assez avancés en saison et dans le Pacifique Sud, ce n'est pas le moment le plus agréable pour naviguer ! »  

« La limite des glaces nous a évité la tentation d'une route plus Sud vers le cœur de la dépression. Cela nous a écarté des dangers d'une brise plus forte et d'une mer plus grosse. C'était un souci de moins de ne pas se poser la question de naviguer au milieu des glaces… Même si en ce moment, nous ne sommes pas très loin des icebergs : Jean-Luc Nélias nous en a montré deux gros dans notre Ouest. Nous avons pu, avec Puma, raser cette limite. Nous avons depuis renvoyé le gennaker lourd et notre route est libre jusqu'au cap Horn. »

« Je ne suis pas étonné de la casse. Nous avons, nous aussi, eu un problème sur l'étrave avant d'arriver à Auckland. C'est une zone extrêmement sollicitée dans la mer croisée. On est obligé de passer entre 18 et 20 nœuds pour tenir le rythme et c'est forcément un risque pour la structure. Depuis le départ, les conditions ont été très dures pour les bateaux, notamment dans la partie devant le mât. C'est évidemment dommage que d'autres concurrents soient handicapés par la casse, mais cela fait partie de la Volvo Ocean Race.

Nous avons ménagé Groupama 4 dès le départ et cela ne nous a pas empêché d'avoir aussi des avaries, en particulier la première nuit avec notre problème d'émerillon de foc de brise. A cause de cela, nous avons dû gérer une voie d'eau par le vérin d'étrave : nous avions au moins une tonne d'eau à l'avant sur le bord de débridé vers les mers du Sud…

Puis Phil Harmer s'est fait mal deux fois à l'épaule : il n'est pas sûr qu'il puisse faire la prochaine étape. On fait des check-up régulier à l'avant, dans le mât et sur la coque pour vérifier que tout va bien, qu'il n'y a pas de voie d'eau. En fait, nous sommes toujours derrière le centre de la dépression et ce n'est pas la meilleure situation : il vaut mieux être devant ! Là, nous avons une mer croisée depuis une semaine, du vent soutenu et très instable avec des grains, et ça va durer jusqu'au cap Horn. Il faut être très concentré à la barre… On est tous un peu stressé. »

« On a claqué 32 nœuds dans un surf, mais ce n'était pas l'objectif d'aligner des scores ! On a toujours gardé une voilure raisonnable et c'est plus difficile d'aller doucement que vite… Ce ne sont pas des conditions de record de vitesse : il faut naviguer en souplesse dans ce style de mer, comme sur un multicoque. L'expérience du trimaran Groupama 3 est sans conteste un plus, nous avons l'habitude de trouver le bon tempo sans danger. Les monocoques sont plus lourds et encaissent plus d'efforts en étant moins volages. Nous n'utilisons donc pas toute la puissance du bateau et depuis 24 heures par exemple, nous ne mettons pas la quille au vent au maximum pour diminuer la charge. Mais à la barre, nous prenons souvent beaucoup de plaisir, parce que nous sommes en tête, et que nous n'avons pas tous les jours la chance d'avoir de telles conditions. C'est toujours mieux la journée que la nuit où on ne voit rien du tout ! Faire glisser un bateau de quinze tonnes sur une vague de dix mètres, c'est fabuleux… Humide, mais fabuleux.»

Des nouvelles du reste de la flotte 
Exception faite de Team Sanya, qui est arrivé à Tauranga à 08h30 UTC aujourd’hui, les trois autres bateaux se débattent toujours avec le Grand Sud.

Telefónica, troisième à 13h UTC à 314 milles, vient d’annoncer qu’il s’arrêterait à Ushuaia, à la pointe sud de l’Argentine. Les Espagnols veulent y réparer l’étrave endommagée qui les freine depuis quelques jours. (Plus d'informations ici)

CAMPER with Emirates Team New Zealand, quatrième à 857 milles, se déroute aussi. L’équipage va s’arrêter à Puerto Montt, au Chili, pour réparer étrave et structure (Plus d'informations ici).

Finalement, malgré ses 1415 milles de retard, Abu Dhabi Ocean Racing est sans doute le seul poursuivant satisfait aujourd’hui : il s’est extrait de la dorsale anticyclonique et avance enfin. Azzam va donc longer la limite des glaces jusqu’à en être libéré, comme ses adversaires, pour plonger à son tour vers le Horn (Plus d'informations ici).

Position des concurrents de la Volvo Ocean Race sur la cinquième étape Auckland - Itajai à 1600 UTC  le 27/03/2012
1. Groupama 4 à 3 053 milles de l'arrivée
2. Puma - à 45 milles du premier
3. Telefonica - à 323 milles du premier
4. Camper - 891 milles du premier (se dirige vers le Chili pour faire escale)
5. Abu Dhabi Ocean Racing - à 1 423 milles du premier
6. Team Sanya - a suspendu sa course

Crédits :
Yan Riou/ Groupama
Amory Ross/PUMA
Diego Fructuoso/Telefonica
Hamish Hooper/CAMPER
Nick Dana/Abu Dhabi
Gareth Cooke/Volvo Ocean Race

Sources : Volvo Ocean Race et Groupama