Sam Davies et son nouvel Initiatives Coeur : « En course au large, l'expérience compte pour beaucoup »

 

Skipper IMOCA depuis 2007, Sam Davies a longtemps attendu d’avoir un bateau neuf et c’est aujourd’hui chose faite. Sam Davies prend les commandes d’un plan Sam Manuard mis à l’eau ce week-end à Lorient. Le nouvel Initiatives-Cœur, d’un rouge vif et étincelant, porte les couleurs de l’association Mécénat Chirurgie Cardiaque et est financé par le même collectif de sponsors que sur son précédent bateau. La Britannique se lance ainsi dans l’aventure d’un quatrième Vendée Globe.

 

Crédit : V Curutchet

À 47 ans, Sam Davies estime que cette attente était pour elle un temps d’apprentissage essentiel. "Je n'ai pas l'impression d'avoir attendu longtemps ou que j’aurais dû avoir cela avant, car je n'aurais probablement pas été à la hauteur ou je n'aurais pas eu l’équipe qui m’accompagne aujourd’hui", déclare-t-elle alors que son nouvel Initiatives-Cœur est amarré depuis samedi matin au ponton de Lorient La Base.
 
"J'ai l'impression que je peux maintenant rendre hommage à ce bateau grâce à tout ce que j'ai appris. C'est ce qui est cool dans ce sport, on ne cesse jamais d’apprendre et de s’améliorer", ajoute-t-elle.
 
Certains skippers IMOCA considèrent leurs bateaux comme des machines impersonnelles, sans personnalité ou esprit. D'autres sont plus sentimentaux et Sam Davies est certainement de ceux-là. En regardant son nouveau pur-sang, construit dans les moules de L'Occitane En Provence (maintenant Bureau Vallée), elle commente : "Il va dormir dehors pour la première fois de sa vie ce soir..."
 
Alors, qu'est-ce qui motive cette navigatrice hors du commun qui a reçu beaucoup d’éloges pour la manière dont elle a terminé son dernier Vendée Globe hors course après avoir réparé son bateau au Cap ? Sam Davies aime tout simplement la voile et son appétit pour ce sport ne faiblit pas.
 
"Je pense que c'est ma passion pour ce sport et je suppose que c'est aussi ma connaissance et le sentiment d’être capable de faire de mieux en mieux", confie-t-elle. "En course au large, l'expérience compte pour beaucoup et je suis naturellement assez patiente. Il n’a donc jamais été question de faire le tour du monde en bateau pour ensuite trouver autre chose à faire. Je veux toujours faire quelque chose du mieux que je peux et cela demande du temps, du travail et de l'engagement."
 
Elle affirme que le temps n'a pas diminué son enthousiasme, ni affecté de manière significative sa capacité à courir au plus haut niveau. "Tout change avec le temps et je pense que cela nous fait faire les choses différemment", explique-t-elle. "La forme physique est vraiment importante pour ce que nous faisons donc je continue à faire du cardio et du fitness mais, par exemple, je ne vais plus courir car mes genoux ne sont plus aussi en forme qu’avant. Cependant, ce n'est pas la force physique qui fait la différence et cela explique aussi pourquoi la voile est un sport mixte, où hommes et femmes courent ensemble dans la même catégorie. J'écoute beaucoup plus mon corps qu’avant. Je fais plus attention parce que je sais que je veux continuer à faire cela pendant encore quelques années. Alors, je prends soin de moi pour être toujours en capacité de pousser mon bateau aussi fort que possible."
 
Sam Davies est claire : le prochain Vendée Globe est son véritable objectif, mais elle est également certaine qu'elle continuera à naviguer après cela. Elle affirme que la course autour du monde en solitaire, à laquelle elle a déjà participé trois fois avec une quatrième place en 2008-09, reste pour elle une "affaire inachevée".
 
"Mon seul objectif aujourd’hui est de faire un très bon résultat sur le Vendée Globe", affirme-t-elle. "Je ne regarde pas au-delà pour l’instant parce que c'est très difficile de savoir ce qu’il se passera. Je mets tout mon enthousiasme et mon énergie pour y arriver", ajoute-t-elle. "Je n'ai aucune idée de ce que j'entends par "un très bon résultat", car la flotte IMOCA évolue beaucoup et cela dépend probablement de la composition de la flotte dans deux ans. Ce qui est important pour moi, c’est déjà de terminer la course et de la terminer d'une manière dont mon équipe et moi pouvons être fiers."
 
Pour elle, son classement au prochain Vendée Globe pourrait ne pas être l'élément sportif le plus important. Dans une flotte de plus en plus compétitive où les skippers terminent désormais à quelques heures d'intervalle après 80 jours en mer, elle explique que son temps de course pourrait être la meilleure preuve de sa performance.
 
"La performance ne sera pas seulement à voir dans le classement, mais peut-être plutôt dans le nombre de jours que je mettrai pour boucler le tour", déclare-t-elle. "Avec ce bateau, j'ai un peu l'impression que le grand défi des trois prochaines années est de faire en sorte que nos bateaux atteignent des vitesses moyennes plus élevées au large et nous n'avons pas encore vraiment trouvé comment le faire, c'est le défi des trois prochaines années."
 
Bien que le nouveau bateau soit basé sur le design de l’ex-L'Occitane En Provence, avec son étrave ronde caractéristique - dite 'scow' -, la navigatrice et son équipe ont apporté de nombreuses évolutions, en collaboration avec l’architecte Sam Manuard. Parmi les points clés, nous pouvons citer la conception des foils, la répartition du poids et le développement toujours en cours du cockpit et de l'intérieur où l’équipe met l’accent sur la "préservation du skipper”, comme dit Sam.
 
Ayant navigué pendant plusieurs années sur un IMOCA à foils de première génération avec une étrave de forme plus conventionnelle, la skipper britannique est impatiente de voir à quel point les nouveaux développements améliorent les performances. "La forme innovante de la coque du nouveau bateau est assez intéressante", explique-t-elle. "Je n'ai jamais navigué sur un ‘scow’, mais j'en ai entendu beaucoup de bien, alors j'ai vraiment hâte de pouvoir comparer à ce que je connais. Nous avons évidemment nos nouveaux foils qui, en théorie, sont beaucoup plus tolérants que les anciens. Encore une fois, ces deux dernières années, il y a eu des améliorations massives sur les formes de foils et j'ai hâte de voir les différences et les sensations à l’utilisation."
 
Le nouveau bateau est forcément une nouvelle pression pour Sam Davies qui va devoir montrer qu'elle peut être compétitive avec une machine plus ou moins de la même génération que les foilers aux mains des meilleurs marins de la Classe. Mais cela ne l'inquiète pas. "Je ne suis pas la seule à avoir une nouvelle machine donc nous sommes tous dans le même bateau, pour ainsi dire", remarque-t-elle. "C'est vraiment excitant car ces dernières années, j’ai parfois été frustrée de ne pas pouvoir suivre la tête de flotte car mon ancien bateau n’était pas assez puissant pour cela."

 

Source : IMOCA