Il aura fallu 17 jours et 19 heures à Kevin Escoffier et son équipage Tom Laperche, Sam Goodchild, Susann Beucke et Georgia Schofield (OBR) pour emporter la deuxième étape de The Ocean Race entre le Cap Vert et Cape Town. Et c’est au terme d’une incroyable bataille menée jusqu’à la dernière seconde que Holcim-PRB a réussi à s’imposer en Afrique du Sud dimanche à 13h10’09 UTC (14h10’09’’ heure française), confortant ainsi sa place de leader au classement général. C’est en effet la deuxième victoire d’affilée pour le bateau suisse qui a régulièrement été dans le groupe de tête sur cette étape particulièrement éprouvante physiquement et mentalement.
Crédit Sailing Energy
Le scénario que nous ont offert les cinq IMOCA engagés sur la course s’est tout simplement révélé exceptionnel dès le coup d’envoi et les premiers bords dans l’archipel du Cap Vert ! Chacun abaissant à tour de rôle ce qu’il pensait être sa meilleure carte stratégique ou son meilleur placement tactique pendant ces 17 jours d’une intensité rare. C’est un jeu de très haute volée qui s’est déroulé durant 6 500 milles sur l’Atlantique. Contraints à plusieurs reprises de s’extirper de zones sans vent, Holcim-PRB et ses adversaires ont aussi eu de courtes occasions de faire parler la poudre dans du vent fort, se livrant ainsi à des speed-tests océaniques de toute beauté !
Pour Kevin Escoffier et l’ensemble de l’équipe, cette victoire à Cape Town est mémorable et pourrait bien rester comme l’un des moments les plus épiques de ce tour du monde. A l’arrivée seules 16 minutes et 45 secondes séparent le projet GO CIRCULAR de son dauphin, Biotherm. L’équipage de 11th Hour Racing Team complète le podium en coupant la ligne seulement 25 minutes et 31 secondes après Holcim-PRB. Ces écarts si faibles témoignent de l’engagement de chaque seconde investi par l’ensemble des femmes et hommes de The Ocean Race pour tenter de s’imposer dans la baie surplombée par la Table Mountain.
Cette victoire a donc une saveur particulière pour les équipiers d’Holcim-PRB après des heures stressantes passées sur l’eau. Elle est aussi plus forte car partagée avec l’ensemble de l’équipe présente à Cape Town comme l’expliquait Kevin Escoffier particulièrement heureux à l’arrivée. « Je suis tellement content pour l’équipe parce que nous n’avions pas toute l’équipe technique pour célébrer notre victoire à Mindelo. Ici, à Cape Town, tout le monde est réuni : les navigants et l’équipe technique. Nous allons partager ensemble cette victoire. Nous avons eu de très faibles écarts entre les bateaux. Cette étape s’est presque apparentée à une étape avec des monotypes comme par le passé. Pour le public, c’est fantastique à suivre. Pour nous, ça a été une énorme bataille sur l’eau. Je ne peux pas être plus satisfait qu’avec cette deuxième victoire avec Holcim-PRB qui est un bateau neuf, avec une équipe que nous avons constituée tardivement pour la course, … Non, nous ne nous sentons pas du tout imbattable. Il n’y a qu’à regarder ce qui s’est passé sur l’eau. C’était très dur de gagner ici. Il était impossible de faire un pronostic même une heure avant l’arrivée. »
C’est à la faveur d’une position sous le vent de ses adversaires que Holcim-PRB a finalement réussi à prendre la tête de la flotte quelques milles seulement avant l’arrivée et à récupérer un flux plus solide le long des côtes. Avant cet instant, ils étaient quatre à pouvoir l’emporter. Sam Goodchild décrit ces derniers moments et souligne l’apport considérable que constitue cette étape pour l’équipe en termes de connaissance du bateau: « Remporter ici à Cape Town, ce n’était pas gagné. Les derniers jours, c’était un peu aléatoire mais nous sommes vraiment heureux de gagner ici, d’avoir tenu jusqu’au bout. Nous sommes restés solides malgré le stress. Nous avons maintenu un bon niveau d’échange. C’était extrêmement constructif pour la suite. Je suis fatigué, c’était vraiment dur ! Nous ne connaissons pas encore bien Holcim-PRB mais nous avons appris beaucoup, notamment en vitesse. C’était une étape super instructive. »
Pour l’allemande Susann Beucke, qui effectuait sa première navigation océanique à bord d’un IMOCA, cette étape restera longtemps gravée : « C’était fou ! Je n’ai jamais vécu une expérience aussi intense sur le plan physique et émotionnel. L’équipage est resté extrêmement concentré du début à la fin et je suis vraiment heureuse que nous l’ayons emporté au final. » Tom Laperche avait lui aussi le sourire à l’arrivée et est revenu sur le plaisir ressenti par l’équipe dans cette navigation au contact. « C’était vraiment intéressant de naviguer comme cela, au contact en IMOCA. Nous avons bien géré toute la première partie. Nous terminons avec un petit peu de chance aujourd’hui. Mais l’étape était vraiment longue. Nous avons trouvé le bon équilibre entre être focus sur la stratégie, faire avancer vite le bateau et prendre du temps pour bien nous alimenter et nous reposer. Nous étions en bonne forme pour gérer cette fin intense. »
Cette étape si majestueuse nous rend aussi impatients de découvrir la suite de ce tour du monde. Dans deux semaines précisément, la flotte de The Ocean Race s’élancera pour une étape longue de 12 750 milles depuis Cape Town jusque Itajai au Brésil. Les mers du sud ne feront pas de cadeau à Kevin Escoffier et son équipage qui se préparent depuis plusieurs mois pour ce rendez-vous unique avec le Grand Sud et l’océan austral. Il faudra une nouvelle fois faire preuve d’audace et de ténacité pour tenter d’écrire la plus belle des histoires sur ce chapitre exceptionnel de The Ocean Race, cette étape étant la plus longue jamais proposée aux marins sur cette épreuve. « La course est longue, je le sais » commentait avec humilité Kevin à l’arrivée à Cape Town pour répondre à chaque question qui l’amenait à se projeter sur la troisième étape. Inutile en effet de tenter de voir plus loin. Il faut savourer cette victoire à sa juste valeur avant de filer pour quelques jours de repos. L’ensemble des marins du Team Holcim-PRB ont été rejoints par leurs proches à Cape Town pour décompresser et recharger les batteries.
Source : Effets Mer