Quebec Saint-Malo / Stéphane Le Diraison aux affaires sur IXBlue

Si l’Allemand Jöerg Riechers, grand favori de l’épreuve, a déjà, et à plusieurs reprises tenu le commandement de la flotte des Class40 depuis le départ dimanche dernier de Québec, pas moins de trois autres équipages lui ont depuis, et avant même la mi-parcours, succédé dans le très convoité fauteuil de leader. Derniers élus en date, Stéphane Le Diraison, et ses « grognards » Bertrand Delesne, Vincent Barnaud et Eric Mezières très inspirés lors du passage à Saint-Pierre et par ce bord au plus près de Terre-Neuve. 

Leur Pogo S2 IXBlue sorti indemne des tortures du Saint-Laurent (certains équipages parlent de journées à plus de 50 empannages) est à présent sollicité au maximum de ses possibilités par un équipage qui enchaîne avec précision un rythme de quart efficace pour faire avancer le bateau tout en reposant les hommes. 

Les deux leaders d’hier, revanchards en diable, foncent à leur vent. Si les écarts en distance au but semblent ténus, moins de 10 milles, on observe avec intérêt l’écart nord sud accentué par Le Diraison. Ainsi qu’Armel Tripon l’affirmait ce matin à bord de Geodis, non seulement la valse des leaders n’est pas prête de s’arrêter, « mais c’est groupé en quelques heures que la flotte des Class40 devrait se présenter à Saint-Malo… 3 systèmes pour une flotte
Il est toujours plus facile de naviguer devant avec un confortable matelas de milles d’avance mais pour les poursuivants, la donne est légèrement différente dans la catégorie des Open. En passant assez nord, Erwan Leroux sur FenêtréA Cardinal 3 a évité une zone d’instabilité et fait désormais route dans un flux de Sud/Sud-Est d’une vingtaine de nœuds. Un flux avec lequel il devrait pouvoir traverser l’Atlantique jusqu’au rocher du Fastnet, marque à contourner pour les multicoques. Derrière Erwan Leroux, Vers un Monde sans Sida d’Erik Nigon fait, quant à lui, face à cette zone de transition. Actuellement sur une route au 122° ce multi de 50 pieds tente de s’extirper de ces calmes avec des vents qui n’excèdent pas les 6 nœuds. Pour rapidement gagner dans l’ouest, il leur faut accepter ce challenge. De son côté, Gilles Lamiré sur Défi Saint-Malo Agglo navigue sur une route assez intéressante dans le Sud. Une route qui va lui permettre de toucher plus rapidement l’avant de la dépression et ainsi allonger cette foulée qui lui manque tant depuis le départ de Québec, il y a 6 jours. Mais à l’heure actuelle, lui aussi doit traverser cette zone tampon. Alors Vers un Monde sans Sida et Défi Saint-Malo Agglo se croiseront-ils dans quelques heures ? Il faudra attendre très certainement la nuit prochaine pour avoir la réponse.

Chez les monocoques de cette catégorie des Open, Vento di Sardegna d’Andrea Mura n’arrive pas à se libérer de la puissante armada des Class40 « Je suis vraiment impressionné par la puissance des Class40. Ils vont très vite et dans ces conditions de vent de travers nous n’arrivons pas à aller plus vite. Notre bateau à pourtant 3 mètres de plus mais ça ne suffit pas. Pour le record de Merit, honnêtement ça va être difficile, mais si nous arrivons le premier monocoque ça sera déjà très bien » nous confiait Tommaso Stella. Vento di Sardegna arrive cependant à garder une toute petite avance sur cette incroyable flotte de Class40 qui pointe juste derrière lui. Plus en retrait, Georges Leblanc sur son grand monocoque Océan Phénix, a bien du mal à suivre le rythme imposé par les 40 pieds et navigue depuis le départ derrière le gros de la flotte. Les conditions qu’il rencontre sont cependant plus favorables car c’est au près débridé dans un vent de 25 nœuds que toute la puissance de cet avaleur d’océan navigue actuellement. Lui aussi devra traverser la zone de clame et une fois encore les écarts devraient s’allonger.

Ils nous racontent…
A bord de Partouche,
« Si on fait du Class40, c'est sans doute pour ça : cette sensation de puissance unique, quand la machine, calée sur son bouchain, bouffe du mille comme un goinfre. We love reaching ! 25 nœuds de vent, à 70° du vent réel, sous GV haute et trinquette, ballasté et matossé à bloc, Partouche laboure la mer - qui a changé de couleur cette nuit - à plus de 11 nœuds de moyenne. A l'intérieur, on entend les craquements de la coque qui encaisse sans broncher et les vagues qui viennent frapper le bateau de côté. En fond sonore, le ronronnement - qui vire à l'aigu quand on accélère - de l'hydrogénérateur rythme les surfs. Il pleut, il mouille, mais voilà ce qu'on est venu chercher dans cette option sud. Et, à l'abri sous la véranda du Pogo 40S2, c'est plutôt confort... À part ça, tout va bien, ou presque : hier en fin de journée notre spi max a posé une RTT sans autorisation du patron, nous lâchant par l'amure. Verdict d'Etienne, qui connaît le métier depuis la Jacques Vabre : "Réparable". On s'y colle dès que ça se calme. Et puis un moment juste incroyable, hier toujours : journée ensoleillée, à la barre en short, tout d'un coup à l'horizon, sur tribord, de l'écume qui vole dans l'air. En désormais expérimenté navigateur de ces zones baleinières, votre sang ne fait qu'un tour. "Baleine !". La voilà : un énorme spécimen qui sonde au même moment. Deuxième souffle, cette fois, c'est sûr, nous sommes en route de collision, sous spi à 11 nœuds. Gasp ! Je lofe ? J’abats ? On choisit de lofer, en espérant que notre amie n'a pas d'option marche arrière. On est passé, elle n'a pas refait surface. Désolé du dérangement, on ne faisait que passer. »

Miranda à bord Campagne de France
« Nous passons les Grands Bancs de Terre-Neuve et exceptionnellement, il n’y a plus de brouillard. En fait, il fait très beau, le bateau et ses occupants parviennent à sécher un peu. C’est le début de la partie atlantique de Québec Saint-Malo, le sprint final vers la France. Le spinnacker est en l’air, qui nous tire en avant dans l’attente de la nouvelle dépression qui va nous dépasser avec ses vents forts et sans aucun doute, sa pluie… »