Thomas Coville a manifestement grimpé dans le bon train ce matin. Tom Laperche et Charles Caudrelier ont acté leur séparation cet après-midi. Le skipper de Gitana 17 a pris les commandes. Ce mercredi matin, Thomas Coville a pris le temps de raconter la scène. « Sodebo avance à 35 nœuds sur une mer toute plate. Le soleil sort de l’eau. Cela veut dire quelque chose de très important dans un tour du monde : cela veut dire qu’on fait cap à l’est. On aura cette scène incroyable où le soleil se lève juste devant nous ».
Au sortir de sa longue glissade le long des côtes du Brésil, l’ancien recordman du tour du monde en solitaire (49 jours et 3 heures en 2016) a fait son virage à gauche. Thomas Coville poursuit : « Pour ceux qui font des records, c’est là qu’on voit la possibilité de le faire. Là, j’arrive à couper l’anticyclone (de Sainte-Hélène) grâce à une dépression qui sortirait de Sao Paulo. C’est aussi, en quelques heures, le passage des chaleurs torrides et humides du Brésil à ce froid qui commence à s’installer. On passe de l’été brésilien à l’automne, et cette froideur qui va s’installer, qui va très vite piquer l’atmosphère du bateau. Là, j’ai déjà deux sous-couches. Il y a un peu de buée à l’intérieur. C’est la marque du contournement de Sainte-Hélène qui nous emmène vers les mers australes, vers tout ce qu’il y a de plus majestueux au monde. (Une terre) qui n’appartient pas à l’Homme. Un no man’s land ».
Pour en arriver là, Thomas Coville a dû pousser fort les curseurs de son engagement. Pour rester dans le match, ou à tout le moins pour ne pas subir le diktat des deux féroces véloces qui mènent le train, le skipper a mené son Sodebo Ultim 3 de manière à ce qu’il puisse embarquer à l’avant d’un front dépressionnaire qui devrait lui permettre de rester dans le même train météorologique que Charles Caudrelier et Tom Laperche.
L’effort, récompensé, fut intense : « Il a fallu cravacher fort hier et avant-hier avec des journées à presque 800 milles par jour. C’était une belle performance et il la fallait. C’était soit ça, soit on se faisait décrocher, et ç’aurait été beaucoup plus compliqué pour nous pour la suite. C’était aussi beaucoup de pression et on a mis beaucoup d’intensité avec la haute vitesse sur ces bateaux très volants, des vitesses très régulièrement à 30-35 nœuds, des mouvements de bateau très brusques. Il faut avoir une attitude pour garder ces vitesses à haute intensité sur 24 heures ; C’est une attention particulière : le bruit, ça vibre, on pilote l’engin sur le bout des foils. Pour autant, ça n’était pas non plus si difficile, je m’attendais à ce que soit plus engagé que ça. Une fois que le bateau est installé à cette haute vitesse, ça déboule ».
Les positions, au classement de 17 heures ce mercredi 17 janvier, font état de la pertinence de son choix. Sodebo Ultim 3 est poussé par le même système météo que les deux leaders, bien que 416 milles le séparent de la tête de la course, arrimée sur les épaules de Charles Caudrelier. SVR-Lazartigue et le Maxi Edmond de Rothschild, qui naviguaient si proches l’un de l’autre ce matin encore que, lors d’une manœuvre, la cellule de routage de Tom Laperche a trouvé nécessaire de prévenir qu’il pouvait y avoir route de collision, se sont séparés. Nul ne sait s’ils ne se retrouveront pas collé-serré de nouveau dans quelques heures, dans quelques jours, peut-être à l’abord du cap de Bonne-Espérance où, entre la zone de protection des cétacés et le grand sud, l’espace se restreint. Chacun avancera à sa façon vers le sas d’entrée de ce no man’s Land décrit avec fascination par Thomas Coville. Les choix sont tranchés, radicaux. Ils devraient, déjà, emmener les deux leaders à passer la longitude du cap de Bonne-Espérance ce vendredi, entre 4 et 6 heures du matin selon les routages effectués par la direction de course. « C’est très beau, mais les couleurs changent, glissait le skipper du team Gitana ce mercredi. On sent le froid. Je suis encore en tee-shirt, mais ce n’est pas la même ambiance ».
Source : Rivacom